dimanche 31 décembre 2006

La religion et les gays .....



Les religions discriminent-elles les homosexuels ?

Source du document : Thérèse Jamin, professeur d’Histoire sociale et politique
de la Haute Ecole Mosane d’Enseignement supérieur - (département social) de Liège,
en Belgique.

Introduction

L’homosexualité est l’attirance et la préférence pour les individus de son propre sexe par opposition à l’hétérosexualité. Le terme "homosexualité" semble avoir été inventé par un médecin autrichien, Karoly Maria Kerthbeny, en 1869 et n’est apparu dans le Larousse qu’en 1930. Les rapports que l’homosexualité a entretenu et entretient toujours avec la norme religieuse, morale et sociale vont de la répression à la reconnaissance des comportements homosexuels selon les époques et la culture.

Histoire de l’Antiquité au Moyen-Age

Les pédérastes n’ont jamais été aussi présents que dans la Grèce antique Plus qu’aucune civilisation, la Grèce antique accorde une place officielle aux amours masculines. Elle n’éprouve aucune répugnance face à l’homosexualité et privilégie une atmosphère de masculinité érotique. Les pratiques homosexuelles sont des comportements sociaux habituels, qui font partie du rite initiatique de la fin de l’adolescence mais ils ne se limitent pas à ce rite c’est à dire qu’il persiste après l’adolescence. A la différence des sociétés contemporaines, les sociétés grecques ignorent la catégorie des homosexuels et nul n’a besoin de mener un combat pour faire reconnaître une différence sexuelle. Zeus (père des dieux, des mortels et du ciel), l’amant de nombreuses femmes, montre lui-même l’exemple en cédant au charme du jeune et beau prince de Troie Ganymède.
Si les amours masculines sont aussi bien acceptées dans la mythologie que dans la vie de tous les jours, c’est beaucoup moins le cas des femmes qui n’apparaissent jamais dans l’art ou les textes, à l’exception, notable, de Sappho, la poétesse de Lesbos.
Au temps des romains, il y a une tolérance modérée de l’homosexualité. La société romaine se caractérise par un hédonisme, principe qui fait du plaisir le but de la vie, sans amour. L’homosexualité et l’hétérosexualité étaient regardées comme des choix acceptables. Aucun des auteurs latins n’a tenu comme propos que l’homosexualité était illégale. Néanmoins, certains étaient contre et les homosexuels étaient considérés par ceux-ci comme déshonorants mais personne n’a invoqué l’autorité de la loi pour les condamner. Comme on l’a vu, le rôle joué dans la relation était plus important que le sexe du partenaire. Le Conseil Ecclésiastique en 309 marque une première rupture avec la tradition gréco-romaine, faisant entrer l’homosexualité dans les péchés. Il ne s’agit pas d’une réelle nouveauté puisque dans le Judaïsme et dans l’Ancien Testament, l’homosexualité était, avec l’adultère et l’inceste, l’un des plus graves interdits sexuels. Dans les textes anciens, l’homosexualité masculine méritait la mort par lapidation. Dès les premiers siècles de l’ère chrétienne, les théologiens considèrent les relations homosexuelles comme une atteinte à l’ordre Divin, unemépris des distinctions entre les hommes et les femmes qui sont établies par Dieu et un interdit absolu. Vers 530, les théologiens rendirent les homosexuels coupables de tremblements de terre, de la famine et de la peste. Ils étaient punis de la peine de mort.

Au premier Moyen-Age(du 6eme siècle jusqu’au 12eme),

l’Eglise semble faire preuve d’une relative tolérance vis-à-vis des homosexuels. Mais le second Moyen-Age (milieu 12eme siècle jusqu’au milieu du 14eme) est intolérant et considère l’homosexualité comme une pratique contre nature et comme une atteinte à la majesté divine et royale. Le retournement entre ces deux Moyen-Ages se situe entre 1150 et 1250 et est provoqué par la lutte contre les hérétiques (qui méprisent le monde et qui sont contraires à la foi) auxquels les pédérastes sont assimilés. A la fin du 12eme siècle, les théologiens considèrent l’homosexualité comme une lèpre immonde qui fait fuir les anges et qui détourne le regard du Diable. En 1179, le Concile (assemblée d’évêques et de théologiens) condamne et excommunie les gays. Ce rejet persistera , on l’a vu, jusqu’au 20e siècle. Comme pour le suicide, une piste de clémence sera celle de la psychanalyse ou de la médecine qui pourront dégager, en partie, la responsabilité personnelle de cette orientation sexuelle.
Positions actuelles des religions
Comme on l’a vu plus haut, l’homosexualité est totalement rejeté par le Judaïsme, cela pour deux raisons : elle est contraire au désir naturellement orienté selon Dieu vers l’autre sexe afin de perpétuer l’espèce humaine ; elle peut manifester le plaisir de se révolter contre Dieu. Les gays qui souhaitent se repentir sont accueillis, aux autres leur sera constamment rappelé qu’ils sont dans l’erreur. L’homosexualité demeure actuellement le TABOU SUPREME de la Thorah. Pour le Judaïsme, l’histoire de l’homosexualité ne peut que se terminer par la mort car le fondement de l’histoire est le couple : "Dieu créa l’homme à son image et il créa l’homme et la femme".
Le Coran considère comme une grave déviance à la loi divine l’homosexualité, qui est fortement condamnée en Islam. Elle est interdite mais son application n’entraîne pas la peine de mort. Le Coran ne permet pas l’exclusion du groupe humain quel qu’il soit mais invite à aider les personnes déviantes à la condition que celles-ci ne prétendent pas que l’homosexualité est une nouvelle norme sociale, car une telle attitude est contraire à la volonté de Dieu. Donc les sociétés musulmanes sont tolérantes tant que les gays sont discrets. Pour le Coran, le mariage des homosexuels est hors norme car l’accepter serait admettre une rupture dans la chaîne des générations qui perpétue l’existence de la communauté musulmane. L’homosexualité est totalement reniée par les musulmans intégristes : " Méprisé soit celui qui de son corps fait un commerce illégal ou l’utilise à des fins impures". Le Coran vise à purifier la société, c’est pourquoi des gouvernements islamistes tuent l’homosexuel, par l’application de principes religieux.
Puisque puisant aux mêmes sources bibliques que les 3 exemples précédents, le protestantisme a longtemps condamné de manière rude l’homosexualité : acte contre nature et péché contre Dieu. D’une manière générale, l’homosexualité représente le désordre, une errance, une déviation et un non-accomplissement de l’intention divine. Les mentalités ont toutefois évolué, c’est pourquoi en 1994, la Fédération protestante de France a publié un document dans le quel l’homosexualité n’est ni condamnée ni approuvée. Comme toujours dans le Protestantisme, les prises de position sont variées. La majorité des églises protestantes se battent contre la ségrégation sociale et donc aussi celle-là. D’autres les accueillent dans l’unique but de les convertir grâce à un accompagnement spirituel. Enfin, d’autres Eglises les accueillent sans les juger car ce qui importe pour elles, c’est l’amour des humains et non la relation sexuelle. Aujourd’hui, il demeure impensable pour la majorité des églises protestantes de bénir les amours homosexuels, mais le sujet est débattu aux USA notamment. .
Pour l’Eglise catholique, on doit distinguer les actes et les personnes : les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés et entraînent un comportement mauvais au point de vue de la morale. Les gays doivent être accueillis avec respect, délicatesse et compassion et il faut éviter à leur égard des marques de discrimination injuste. Mais la Congrégation de la doctrine de la foi a publié en 1992 : " il y a des domaines dans lesquels ce n’est pas une discrimination injuste de tenir compte de l’orientation : adoption d’un enfant, instituteurs, entraîneurs sportifs" Le catholicisme est opposé à toute forme de reconnaissance religieuse des gays car ce serait placer l’homosexualité sur le même pied que l’hétérosexualité. Accepter cette reconnaissance remettrait également en question le principe du mariage, fondé sur la différence des deux sexes, qui est nécessaire à la procréation et à l’éducation équilibrée des enfants.
En 1999, un prêtre nommé Rudy Borremans a été déchargé de ses fonctions de vicaire par le Cardinal Danneels en raison de son homosexualité ouvertement proclamée et surtout pratiquée. Mr Borremans cherche toujours une procédure judiciaire pour contester la décision de sa mise à l’écart de l’Eglise catholique. Mais l’Eglise ne condamne pas (plus) les tendances, seulement les pratiques. Un prêtre homosexuel a tous ses droits religieux s’il reste abstinent, comme doit l’être un prêtre hétérosexuel.... Mais il est évident que lorsqu’un adolescent catholique se découvre homosexuel, on peut s’interroger sur les sentiments qu’il éprouve en imaginant ce que sera sa future vie affective, s’il veut rester dans la norme religieuse !

Conclusion.

D’après une enquête faite en 1985 par Xavier Thévenot, seul un homosexuel sur dix se sent aidé par l’attitude de l’Eglise. Les religions sont toutes opposées à la reconnaissance religieuse et sociale de l’homosexualité. Pourtant l’un des dix commandements de la religion chrétienne est : "Tu aimeras ton prochain". Pourquoi discrimine-t-elle alors l’amour entre personnes du même sexe ? Aujourd’hui encore, dans environ 74 pays du monde, les comportements homosexuels sont interdits, considérés comme illégaux, allant dans certains cas jusqu’à la peine de mort. Ce n’est qu’en 1993 que l’Organisation mondiale de la santé a supprimé l’homosexualité de la liste des maladies. Et même si des progrès ont été faits, aucun Etat n’offre encore à ce jour une protection juridique complète contre la discrimination de l’homosexualité. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir dans le combat des homosexuels.

Bibliographie

Livres - John Boswell " Christianisme, tolérance sociale et homosexualité" éditions Gallimard 1980, 418 pages - Xavier Thévenot "Homosexualité masculine et morale chrétienne" éditions du Cerf 1985, 309 pages
Revues - "Têtu", n° 63, janvier 2002. - Nouvel observateur, n°1859, 2000 pp. 38 à 47 - Actualité des religions n°5, dossier spécial : l’homosexualité", mai 1999 pp. 36 à 51 (y compris photo de la p. 48) - Actualité religieuse dans le monde n°186, dossier sur l’homosexualité, 2000 pp.68 à 72 - Les collections de l’histoire " L’amour et la sexualité" n°5 juin 1999 - Film vidéo : Philadelphia - Encyclopédie Encarta 1998 " L’homosexualité"

vendredi 29 décembre 2006

Honneur aux pionniers....

Ruth Bernhard photographe américaine est décédé à l’âge de 101 ans le 18 décembre 2006 à son appartement de Pacific Heights en Californie.Ruth Bernhard est née le 14 octobre 1905 à Berlin, fille de Lucian Bernhard, graphiste réputé.

En 1927, après deux années à l’académie d’art de Berlin, elle décide de rejoindre son père qui vit déjà à New York. Elle s’investit dans le mouvement lesbien, elle y rencontre Berenice Abbot. Les deux femmes deviennent amies. Bernard débute alors comme laborantine au magazine new-yorkais « The Delineator », avec comme patron Ralph Steiner, lui-même photographe.Peu de temps après, elle quitte cet emploi et s’achète une chambre grand format 8 X 1O inches (20x25 cm) .

Elle débute en faisant des portraits d’amies de son père, et devient photographe indépendante.C’est en 1935, qu’elle fait la rencontre d’Edward Weston sur la plage de Santa Monica en Californie. Cette rencontre influencera profondément sa carrière. Elle déménagera de New York pour Carmel mais la clientèle ne suit pas (surtout avec E. Weston comme voisin). Elle déménagera bientôt à nouveau pour ouvrir un studio à Hollywood. Weston lui montra la voie d’une photographie créative et artistique. Il la considéra d’ailleurs comme la plus grande des photographes de nus, ce qui n’est pas un mince compliment. En Californie elle travaille aux côtés d'Ansel Adams et des membres du groupe F. 64. En 1953, elle s’établit à San Francisco.

Dans les années 1960 elle travaille avec Joe Folberg, fondateur de la Vison Gallery de San Francisco et un des tout premiers défenseurs des tirages limités en photographie.En 1967 elle y fait la connaissance du Colonel Price Rice avec lequel elle vivra jusqu'à sa mort en 1999. De 1968 à 1976 elle enseigne à l’université de San Francisco.elle fait partie de ce qu’on appelle à présent la tradition photographique de la côte ouest. Elle a dirigé des conférences et animé de nombreux stages à travers les Etats-Unis et cela jusqu'à l’âge de 95 ans.Elle reste surtout connue pour ses photos de nus féminins.

Considérée comme une pionnière à une époque où les femmes sont encore peu présentes dans le domaine de la photographie,et où l’homosexualité féminine est problématique.Ses photographies font partie des collections des plus grands musées, tels que « The George Eastman House », « The Museum of Modern Art de New York », « The Metropolitan Museum of Art » (New York) et la Bibliothèque Nationale à Paris. Sur la fin de sa longue vie, elle collabora avec la biographe Margaretta K Mitchell sur sa biographie intitulée « Ruth Bernhard : « Between Art and Life » (San Francisco, CA: Chronicle Books, 2000) où elle révéla ses liaisons avec des hommes et des femmes.

« Pour moi la création de chaque photographie est le résultat d’une expérience émotionnelle aigue qui ressemble, j’en suis convaincue, à celle que peut vivre un poète ou un compositeur. Chaque image est le résultat d’une impulsion intense que je ne peux dénier. Dans ma vie comme dans mon œuvre, ce qui me motive profondément c’est ce désir d’équilibre et d’harmonie qui va au-delà de l’expérience humaine, en quête de l’essence de tout être et de sa fusion avec l’univers. » Ruth Bernhard

jeudi 28 décembre 2006

Et pourquoi pas lme droit d'asile pour les gays ?

Le droit d'asile pour les Gays menacés dans leurs pays

Requérants d'asile LGBT: Un refuge précaire
SUISSE - Face à une administration qui entretient sa mauvaise foi institutionnelle, les réfugiés LGBT qui débarquent en Suisse continuent de devoir franchir un impossible parcours d’obstacle. Tour d’horizon, à la veille des votations du 24 septembre.
Arnaud Gallay
septembre 2006

Pour en savoir plus
Votations du 24.9: les «contre» (Coalition pour une Suisse humanitaire)
Votations du 24.9: les «pour» (UDC)
www.queeramnesty.ch
26 ans: Kia* a, à peu de choses près, l’âge du régime islamique en Iran, pays où il a grandi dans une famille restée plutôt fidèle à la monarchie. «J’ai toujours été contre le régime islamique. En Iran, il n’y a pas de liberté pour les homosexuels, mais pas non plus pour les hétéros! Tout est sous le coup de la loi islamique: ce que l’on porte, ce que l’on fait, ce que l’on mange…» A Téhéran, Kia partageait un appartement avec son ami. Quitter le pays, il l’a longtemps projeté, mais lorsque s’ébruite le fait qu’il vit une relation homosexuelle, le couple décide de partir – sans avertir personne. «Pour 7 000 euros chacun, un passeur nous a d’abord fait franchir la frontière turque. De là, nous avons été transportés pendant plusieurs jours dans une camionnette. C’était terrible. Ce sont vraiment des moments que j’essaie d’oublier: nous étions traités comme de la merde, rien à manger, rien à boire. Et toujours la peur d’être attrapés par la police.» Au terme de plusieurs semaines, Kia et son ami sont débarqués en Suisse, un pays dont ils ne connaissaient «même pas le nom de la capitale.»
Parmi les 10 000 réfugiés qui se sont annoncés en Suisse en 2005, combien sont les gays, lesbiennes ou trans qui fuient des conditionsde vie insupportables, des menaces et violences dans leur pays? L’autorité en charge des demandes d’asile, l’Office des Migrations (ODM) est incapable de le dire. On sait toutefois que ces dernières années, de tels cas proviennent principalement d’Iran, du Cameroun, d’Algérie, de Roumanie ou de Cuba. Le rôle de l’orientation sexuelle dans ces cas est varié, comme l’explique Liselotte Barzé, de l’ODM: «[les requérants] invoquent le fait d’avoir été contraints de fuir leur pays d’origine en raison de leur homosexualité, parfois en corrélation avec d’autres problèmes, ou, en cours de procédure d’asile, ne plus pouvoir regagner leur pays d’origine pour ce motif.»
Intimidation
En déposant une demande d’asile en Suisse, Kia s’est lancé dans l’inconnu. «En arrivant au centre d’enregistrement, nous n’avions pas la moindre idée de la façon dont les homosexuels sont considérés ici. On nous a d’abord emmenés dans un centre du côté de Saint-Gall. Une très mauvaise expérience: l’atmosphère était tendue, très conflictuelle. L’homme qui m’a auditionné était très agressif. Il cherchait manifestement à m’intimider, mais j’ai réussi à dire tout ce que je voulais. J’ai dit que j’étais avec mon ami, et que nous ne voulions pas être séparés […] C’était la première fois que je parlais d’homosexualité – qui plus est avec un officiel.» Hans Markus Herren de «Queeramnesty», la section LGBT d’Amnesty International, souligne que cette première audition est décisive: «Tout ce que l’on raconte à ce moment-là peut être utilisé par la suite en faveur ou défaveur du requérant. Or, beaucoup de réfugiés n’osent pas y évoquer les questions de sexualité. C’est souvent plus tard dans leur parcours de requérant, quand ils découvrent qu’en Suisse on parle assez librement d’homosexualité, qu’ils le mentionnent. Et là, c’est toujours interprété comme une incohérence et inscrit en leur défaveur.»
«Confiance et empathie»?
On minimise cette difficulté à l’ODM, où Liselotte Barzé assure que «les victimes de persécutions liées au sexe sont en mesure d’exposer leurs motifs d’asile de manière circonstanciée lorsqu’elles sont entendues dans un climat de confiance et d’empathie […] Une attitude attentive et parallèlement résolue est déterminante au moment de l’établissement des faits, en particulier lorsque les motifs d’asile allégués touchent la sphère intime de la personne concernée.» En pratique, les femmes susceptibles d’aborder des questions d’abus sexuels ont la possibilité d’être entendues en présence de femmes uniquement. En revanche, pourdes hommes – homosexuels ou autres – aucune possibilité de ce type. Ainsi Kia s’est-il vu imposer les services d’un traducteur d’origine afghane: «On peut dire qu’il était homophobe, résume Kia. Ses traductions étaient souvent très impolies et méprisantes. Au lieu de dire ‘homosexuel’ ou ‘gay’, il utilisait des termes persans équivalents à ‘pédé’ ou ‘tapette’, par exemple. Je ne savais pas comment réagir à l’époque, j’étais totalement désemparé.» Ayant suivi plusieurs cas similaires, Hans Markus Herren confirme: «Très souvent, les problèmes surviennent à cause du traducteur, face à qui le requérant n’osera pas parler de son homosexualité.»
«Soyez discret»
Kia et son ami ont déjà passé près de 6 mois dans un foyer en Suisse centrale, dans une petite chambre avec huit personnes, lorsque arrive la décision de l’ODM. Elle est négative. «Ils disaient que nous ne pouvions pas apporter de preuves. En quelque sorte, c’est vrai: Il n’y avait pas de caméra qui ait filmé ce que j’ai fait là-bas […] L’ODM m’a écrit que si l’homosexualité est passible de la peine de mort, celle-ci n’est pas observée en pratique. Ce qui revient à dire que les homos n’ont pas vraiment de problèmes. Quand on connaît la situation des homosexuels dans les pays musulmans, et plus encore dans un régime islamique comme l’Iran, c’est totalement illogique. Il faut se rendre compte que les lois islamiques vont jusqu’à statuer sur la taille des pierres qui servent à la lapidation!»
A Queeramnesty, Hans Markus Herren a eu connaissance du cas d’un couple de femmes azerbaïdjanaises: «Elles se sont vu répondre en première instance qu’il n’était ‘pas impossible’ de vivre une homosexualité cachée en Azerbaïdjan… On entend souvent la même chose pour les pays du Maghreb: ‘Soyez discrets, et rien ne va vous arriver’. C’est un argument très pernicieux, qui sous-entend que les gens n’ont pas le droit de vivre comme ils veulent.»
Marie-Claire Kunz, conseillère juridique et sociale au Centre Social Protestant de Genève, n’est pas étonnée par ce type de raisonnement: «La logique des autorités repose souvent sur des principes aussi flous que ‘l’expérience générale de la vie’, qui voudrait par exemple que des gens qui se savent menacés par les autorités à cause de leurs activités politiques cessent ces activités pour se prémunir contre des persécutions futures, plutôt que de venir en Suisse.» Elle confirme l’extrême difficulté de justifier une menace avérée: «Lorsqu’elles examinent si la crainte de persécutions est fondée, les autorités ont une lecture très restrictive du contexte dans lequel cette crainte s’exprime. Arriver à contrebalancer cette interprétation dépend largement du rôle que peuvent jouer les défenseurs des demandeurs, dans le cadre d’un recours. Or en Suisse, l’Etat ne garantit pas une telle assistance juridique aux requérants d’asile.»
Une situation bloquée
Sa demande d’asile rejetée, comme beaucoup des réfugiés gay en Suisse, Kia a obtenu l’an dernier une «admission provisoire», par lequel les autorités reconnaissent qu’une expulsion vers l’Iran mettrait sa vie en danger. Lucide, il explique qu’il doit principalement cette décision à sa participation – en Suisse – à des forums consacrés aux droits de l’homme et notamment à la situation des minorités sexuelles en Iran. Son permis F renouvelable tous les 12 mois maintient Kia dans une situation précaire. S’il maîtrise déjà l’allemand, il reste toutefois bloqué professionnellement. «Je ne peux pas poursuivre une formation qui me permettrait de faire reconnaître mes diplômes iraniens, explique-t-il. Il me faudrait un permis B.» Quant à la relation avec son ami, elle n’a pas résisté aux mois d’angoisse et de promiscuité dans les foyers de requérants: «Sans doute qu’en ayant passé tout ce temps ensemble, sans vraiment avoir quelque chose à faire, on s’est beaucoup disputés… Mais il reste un ami très proche. Aujourd’hui je n’ai pas de problème pour me faire des amis ou en société. Pour une relation c’est autre chose, c’est plus difficile de projeter quoi que ce soit. Il y a un problème de tempérament, les gens sont froids!» ajoute-t-il avec un sourire désabusé.

La culture gay....

La culture Gay sous toutes ses formes........

Les homothugs au devant de la scène
Jusqu’à la fin des années 1980, les homothugs avaient une identité cachée. Ils étaient sous le DL «down law», c’est-à-dire qu’ils dissimulaient leur homosexualité à leurs partenaires pour s’adonner à des rituels qui ne devaient pas être connus de tous. Aujourd’hui, les homothugs sont devenus un mouvement qui revendique une identité culturelle à part entière, même si leurs postulats peuvent apparaître paradoxaux.
Le substantif homothug est composé de deux substantifs accolés, homo qui renvoie à homosexualité, et thuggerie qui se réfère à la culture du gang. La référence au crime est très populaire dans les classes défavorisées noire et hispanique, près de 63% des détenus qui remplissent les prisons américaines appartiennent à ces communautés. L’essence de la culture du gang s’inscrit dans le milieu carcéral, et un séjour en taule devient une marque de déférence.
Contrairement au stéréotype de l’homosexuel efféminé, habillé élégamment, les homothugs affichent des codes vestimentaires similaires à ceux des petites frappes des quartiers chauds. Ils portent des baggies (jeans très larges) qui tombent comme des sacs, et leur visage est encerclé d’un « doo-rag », sorte de collant noir qui plaque leur chevelure.
Le « warehouse » ne paie pas de mine, et on pourrait penser que l’on a affaire à une vieille usine abandonnée, si ce n’était cette foule de silhouettes qui entourent le petite porte d’entrée. Il est trois heures du mat, et c’est ici que près de sept cents Blacks et Latinos se retrouvent dans une atmosphère électrique.
A l’intérieur des murs, l’ambiance est chaude. Le DJ s’exclame : « From now on, The Warehouse will not play faggot music ! » Ces propos homophobes provoquent l’hilarité de la salle.
Les homothugs ne se reconnaissent pas comme des homosexuels à part entière. Certains dénigrent même le courant dominant de la culture gay qu’ils associent à la culture blanche. Le professeur Kendall Thomas, co-directeur du Centre de recherches de droit et de culture à l’Université de Colombia, souligne : « Le courant dominant de la culture gay représente rarement les sous-ensembles qui la composent. [...]Les hommes de couleur sont souvent perçus comme des objets de désir pour les Blancs plus que les sujets de leur propre désir. » D’où le désir profond des homothugs de vouloir se distinguer de cette socio-catégorisation.
S’il subsiste parfois une ambiguïté identitaire sexuelle - certains sont homo, d’autres bi, d’autres s’autorisent des rapports oraux avec les hommes mais réservent la pénétration aux femmes - le dilemme tient avant tout à une revendication culturelle forte, devant laquelle leur sexualité les met en porte-à-faux. Leurs cultures noire et hispanique, d’appartenance souvent machiste, perçoivent l’homosexualité comme une tare, et ils retrouvent dans le hip-hop une opportunité de dépasser ce confinement du label « gay » dans lequel ils ne se retrouvent pas.
Pour certains, la dénomination homothugs est une vitrine derrière laquelle ces hommes camouflent leur identité sexuelle et s’octroient une puissance virtuelle que leur confère le hip hop, scène cathartique d’ « une culture d’hommes en colère ».
Dutchboy, membre de « The Rainbow Flava rap collective », qui produit actuellement des compilations de hip hop de gays, lesbiennes, transsexuels, rappelle que « les homothugs s’identifient entièrement à la culture du hip hop, qui résonne en eux et leur offre un lien communautaire que la culture gay qui prévaut à New York est incapable de leur offrir ». Ils ne semblent absolument pas touchés par les diatribes homophobes que distille la verve effilée de chanteurs comme DMX ou Emminem. L’incitation à la haine du « faggot » ne leur est pas destinée.
D’ailleurs, comme aiment à le rappeler de nombreux rapeurs, leurs messages ne sont pas foncièrement homophobes ; le vocable pédé connaît un glissement sémantique significatif, où le schème de l’homosexualité disparaît au profit des connotations négatives qui le caractérisent. « Pédé » devient synonyme de « faible », de « con », de « bolosse ».
Néanmoins, pour la communauté gay, cette subculture est problématique. Les homothugs nient ouvertement leur appartenance à la communauté, mettant sous couvert leur homosexualité, alors que les partisans se sont battus bec et ongles pour sortir de cet anonymat. D’autres ne ressentent qu’un profond mépris pour ce mouvement qu’ils considèrent comme une branche abâtardie de l’homosexualité.
C’est comme si subsistait une hiérarchie dans laquelle différents groupes d’intérêts se disputent le haut de l’échelle.
Cela montre surtout que l’homosexualité n’a pas de canonique figée, et qu’il existe un perpétuel mouvement d’évolution et de revendications hétéroclites

La vie des gays dans les banlieues....

GAYS des BANLIEUES....

J'ai retrouvé dans les archives de l'"Express" un article de Juin 2006 signé Laure MARCHAND qui décrit le martyre que vivent nos jeunes amis homosexuels qui vivent dans les banlieues et je vous le transmets bien volontiers :'Express du 21/06/2004IntoléranceCités : le malheur d'être homopar Laure MarchandHumiliations, insultes, passages à tabac, viols... Dans certains quartiers, les homosexuels vivent un calvaire. Surtout les jeunes d'origine maghrébinen connaît les couples gays branchés, à Bègles et dans le Marais. Mais en banlieue, pas loin, au bout des lignes de bus, c'est l'enfer. «Sale pédé!» est l'insulte qui circule le plus dans les cages d'escalier. Et c'est la pire de toutes. Humiliations, agressions, mariages forcés... Les homosexuels y subissent une violence quotidienne. Et ceux-là n'iront pas manifester à la Marche des Fiertés, à Paris, le 26 juin.Rien ne sort du monde clos des cités. L'association SOS Homophobie a lancé, il y a six mois, un premier appel à témoignages. «Sur notre ligne d'écoute, nous recevions des appels de victimes de la France entière, explique son président, Ronan Rosec. Rien ne remontait de banlieue.» Des histoires commencent à filtrer des barres d'immeubles. Anonymes, clandestines et violentes. «Mon ami et moi ne rentrons jamais en même temps, raconte l'un. Lorsque nous faisons les courses, nous y allons à tour de rôle. Nous vivons un véritable état de siège.» Un autre confie son passage à tabac par une vingtaine de jeunes: «Le chef de bande m'a dit: «Si tu veux rentrer chez toi, tu nous suces.»» Il a refusé. Résultat: «Huit jours d'incapacité totale de travail.» Deux soirs plus tard, ils parviennent à s'introduire chez lui par la terrasse et récidivent: «Après avoir été cueilli dans mon lit, j'ai passé le restant de la nuit, nu, assis dans mon canapé. J'ai été torturé. J'ai cru qu'ils allaient me tuer.»Des garçons victimes de viols collectifs ont eu la force de se confier à l'association Ni putes ni soumises. «Impossible d'aller porter plainte au commissariat du quartier, inimaginable de parler à la famille», explique Nasser Ramdane, un de ses militants. Selon cet ex-vice-président de SOS-Racisme et ancien membre du bureau national du Parti communiste qui a fait son coming out dans Têtu, «le soupçon qu'ils étaient consentants planera toujours».Une seule solution pour ces homos: quitter la cité. Bien peu y parviennent. Dans les petites villes et à la campagne, le prétexte des études permet souvent de fuir une atmosphère étouffante. Dans les cités, l'ascenseur social en panne coince les jeunes entre les ragots des voisins et les clichés sexistes des copains. Les gays sont donc passés maîtres dans l'art de jouer les hétéros. «Dans la cour du lycée, il y a eu une punition collective, raconte Jonathan. Des mecs en avaient repéré un. Pendant la récréation, à l'écart, ils lui ont pissé dessus.» Du coup, l'adolescent donne des gages. Il participe à des bastons, joue à la petite racaille, «pour être un mec fiable». Pendant des années, il a changé de panoplie dans les toilettes du train de banlieue. Il troquait son jean et son tee-shirt moulant contre un survêtement passe-partout.«Surtout ne pas se faire griller», comme ils répètent tous. Surtout pas chez soi. Les jeunes d'origine maghrébine courent le risque supplémentaire d'être rayés du livret de famille. Dans certaines familles musulmanes, marier un fils homosexuel reste le meilleur moyen d'étouffer le scandale. Kamel avait profité de ses études scientifiques à Orsay pour déguerpir de sa cité de Creil. Il était le seul célibataire d'une fratrie de huit enfants. «Tous trouvaient ça bizarre. Ma sœur m'a lancé qu'elle préférerait avoir un frère toxicomane que pédé.» Puis sa mère lui propose un mariage arrangé. «On m'aurait amené une fille du bled, soumise, qui n'aurait pas posé de questions, raconte ce conseiller en recrutement. Je ne voulais pas finir comme tous ces beurs mariés qui traînent au bois de Boulogne avec un siège de bébé à l'arrière de la voiture.»«Par quel moyen les tuer?»Salim, lui, a subi une tentative de «rééducation». Quand l'étudiant modèle se métamorphose en «gars fêtard bien dans sa peau», dit-il, son grand-frère a pour mission de l'espionner. «Mon père m'a alors emmené en Algérie. Je n'ai pas senti le coup fourré. Je devais y passer dix jours. J'y ai été séquestré dix mois. Sans argent ni passeport. J'étais soumis à une cure de mentalité qui, selon mes parents, devait me sauver.» Le père a finalement ramené son fils à Montpellier. Mais sa famille s'acharne encore. Le 3 août 1998, ses frères le tabassent et le mettent à la porte avec la bénédiction maternelle. Il ne les a jamais revus depuis.Le Coran promet pourtant aux croyants «un paradis où ils seront servis par des éphèbes immortels [...] semblables à des perles cachées», souligne Christelle Hamel dans le Dictionnaire de l'homophobie (PUF). Mais, pour les gays musulmans qui entendent depuis leur enfance qu'il s'agit du plus grand des péchés, «se construire avec une image positive de soi devient très difficile», ajoute l'anthropologue. Karim a la voix tourmentée et le visage délicat. Il vit son attirance pour les garçons comme une perversion: «15 000 bonnes actions ne suffiront pas à rattraper ça.» Son secret le ronge. «Inch'Allah!», son salut viendra peut-être «d'une rencontre avec quelqu'un»... à épouser.Déjà mis à l'index par les traditions religieuses, les homosexuels ont désormais à craindre la propagande des intégristes. Nasser Ramdane connaît bien «les discours des barbus», au pied des immeubles. «Port du foulard, lutte contre les homos, il s'agit du même combat. Ce courant idéologique accuse l'Occident de pervertir les musulmans. En gros, c'est la faute des Blancs s'il y a des Arabes homos», explique le militant de Ni putes ni soumises. Vaste hypocrisie. «La première expérience homosexuelle a souvent lieu avec un cousin au bled, note Christelle Hamel. Une perspective impensable dans la cité. Dans le Maghreb, il y a un décalage entre la dureté de la loi qui réprime ces pratiques et la réalité. Un espace de liberté existe pour des relations entre hommes, tant qu'elles restent discrètes.»Ce qui ne convient pas vraiment à Youssef Qaradhawi, idéologue des Frères musulmans et star d'Al-Jazira. Son opus Le Licite et l'illicite en islam est un guide de bonne conduite vénéré chez les jeunes tentés par l'islamisme. L'ouvrage est en bonne place dans les librairies spécialisées de la rue Jean-Pierre-Timbaud, dans le XIe arrondissement de Paris, à côté des cassettes de Tariq Ramadan. On peut y lire que, pour ce «péché répugnant [...] les savants en jurisprudence ne furent pas d'accord sur le châtiment [...]. Est-ce que l'on tue l'actif et le passif? Par quel moyen les tuer? [...] Cette sévérité qui semblerait inhumaine n'est qu'un moyen pour épurer la société islamique de ces êtres nocifs qui ne conduisent qu'à la perte de l'humanité». En janvier dernier, lors de la manifestation contre le projet de loi interdisant le port du voile à l'école organisée à Paris par le groupuscule extrémiste du Parti des musulmans de France, la diatribe sur ceux «qui se sentent choqués par le foulard et qui ne se sentent pas choqués par l'homosexualité» a remporté un vif succès.Depuis 1998, l'association Kelma organise des soirées «Black-Blanc-Beur» aux Folies Pigalle le dimanche soir. C'est la bouffée d'oxygène hebdomadaire. Là, pendant quelques heures, ils laissent leur déguisement d'hétéro au vestiaire et jouissent d'un peu de liberté. Deux Blacks habillés comme des mauvais garçons du Bronx se tiennent par la main. Un jeune intimidé regarde la piste de danse sans oser s'aventurer. Il tripote sa boucle d'oreille, une petite main de Fatma dorée, comme un porte-bonheur. Ce soir-là, la boîte est pleine à craquer. Cheb Khalas, chanteur de raï algérien, donne un concert. Dans une ambiance bon enfant, les mains virevoltent, les bassins ondulent, les youyous s'élèvent. Il est déjà 23 h 30, la file d'attente s'allonge pour récupérer les blousons. Il ne faut pas rater le dernier RER.

Le tourisme gay à la Réunion

LA Charte Gay Friendly établie par le Comité du Tourisme de La Réunion ne date pas de cette année. C’est en 2004 que le projet se concrétise avec au début une vingtaine d’adhérents, professionnels du tourisme. Depuis, le nombre d’adhérents a plus que doublé. En août 2006, 45 professionnels se sont rapprochés de la Charte Gay Friendly : agences de voyages réceptives, sites Internet, location de voitures, bars, hôtels, chambres d’hôtes de charme, restaurants, location de meublés, night-club, associations, etc.
Une destination prisée par le tourisme gay
Pour les reconnaître, un logo (sorte d’arc-en-ciel) est présent à l’entrée des établissements adhérents ou sur les sites Internet. Cette année, la crise du chikungunya a certes affecté tout le secteur touristique, mais les adhérents de la Charte ont tout de même ressenti « les effets positifs des actions menées par le CTR auprès de cette cible ». « C’est effectivement une des rares cibles qui a augmenté sa fréquentation pour visiter La Réunion, et ce malgré le chikungunya. On continue de voyager comme si de rien n’était et de bénéficier au maximum des promotions », explique la Présidente du CTR. À noter, une augmentation des réservations et des demandes d’informations.L’adhésion à la Charte est la garantie par un accueil de qualité et respectueux de cette clientèle spécifique. Il ne s’agit pas de proposer via la charte un tourisme communautaire à une clientèle en recherche de destinations festives (comme Ibiza, Sitgès, Mykonos).
Une clientèle qui veut être accueillie « comme Monsieur tout le monde »
Le Comité du Tourisme a voulu s’adresser à la majorité des gays, c’est-à-dire 75% d’entre eux qui désirent voyager « comme Monsieur tout le monde ». « Cette cible, précise Jocelyne Lauret, attend simplement que l’offre soit gay-friendly, ce qui signifie que les prestataires ne portent pas de jugement sur leur vie privée et qu’ils soient attentifs à leurs demandes spécifiques. C’est une clientèle qui a besoin d’être rassurée, qui voyage surtout par les réseaux, car elle est encore victime dans la société ». Loin de proposer des espaces exclusivement réservés aux gays, la Charte regroupe tous les professionnels qui s’engagent à être un espace tout public où cette clientèle peut se sentir à l’aise, garantissant la non-discrimination, l’absence de jugement, la discrétion, le respect de la vie privée et la sécurité. Ces professionnels s’engagent aussi à informer sur les lieux de sorties gay.
La Réunion, une destination de « voyage de noces »
Et la Charte d’accueil du CTR a des effets positifs sur la fréquentation touristique en 2006 pour les adhérents. L’étude menée par le CTR auprès des établissements hôteliers (les petites structures, puisque les grands établissements ne tiennent pas de statistiques sur le type de clientèle) et les agences réceptives montrent une augmentation des réservations et des demandes d’information. Les guest house et chambres d’hôtes de charme ont enregistré en moyenne une augmentation des réservations de 4 à 5 nuitées, voire des longs séjours (15 jours), des réservations faîtes via le tour opérateur Attitude Travels (qui réalise des circuits exclusivement pour les homosexuels) ou sur Internet par une clientèle française, allemande et suisse, plutôt aisée. Les agences ont remarqué une augmentation de la fréquentation de 3 à 7% pour une durée moyenne de 7 à 10 jours, et de 5 à 10% des demandes de renseignements. A noter que La Réunion est ponctuellement citée par les Allemands comme destination de « voyages de noces » pour les mariages gay. La Charte représente à cet effet un support marketing sur les marchés étrangers. « La Belgique, la Hollande, l’Espagne et d’autres pays ont légalisé le mariage gay, ce qui représente une cible de clientèle idéale pour La Réunion », souligne la présidente du CTR.
L’étude menée par le CTR s’est aussi intéressée aux réactions des touristes. Le résultat est clair : ils sont « absolument satisfaits et ravis par leur séjour et particulièrement par l’accueil des Réunionnais et des structures Gay friendly ». Quelques regrets toutefois que ne manque pas de souligner Jocelyne Lauret : « Les touristes regrettent un peu le manque de lieux de sorties adaptés et la difficulté de pratiquer le naturisme, suite aux problèmes que certains ont pu vivre sur la plage de Trois-Bassins ». Des incidents que le CTR juge en décalage avec l’image que veut véhiculer la Charte et qui pénalise les efforts des professionnels du tourisme pour accueillir la clientèle homosexuelle. Pour les professionnels, ces réactions sont encore la conséquence d’une mauvaise connaissance de l’homosexualité. Pour y remédier, le CTR a signé une convention avec l’Association Gay union, dont la Présidente est Patrice Leroy, pour organiser des réunions d’information l’année prochaine afin de préparer à l’accueil Gay friendly et ainsi lutter contre l’homophobie. Les nouveaux adhérents seront également soumis au contrôle d’une Commission chargée d’évaluer les prestations et les engagements. Car si La Réunion est une terre multiculturelle, avec une certaine ouverture d’esprit, elle n’est pas exempte de préjugés.
Le tourisme gay : un préalable au tourisme international ?
L’objectif de la Charte Gay friendly est de faire de La Réunion une destination de référence pour la clientèle homosexuelle à moyen terme, c’est-à-dire d’ici 5 ans, et cibler en priorité les pays européens (dont l’Allemagne qui a la population homosexuelle la plus influente d’Europe), mais aussi plus proche de nous, l’Afrique du Sud et l’Australie. « Le tourisme gay était jusqu’à présent essentiellement urbain. Il n’y avait pas d’offre de destination de tourisme d’aventure, sportif et de découverte. Nous envisageons dès 2007 de mettre en place un circuit Paris/Réunion/Afrique du Sud avec les tours opérateurs, dont Attitude Travels pour proposer une offre diversifiée. Ainsi, les touristes pourront passer une semaine à La Réunion puis se détendre à Cape Town pour s’amuser », souligne le CTR. Mais au lieu d’être une simple niche, la clientèle homosexuelle ne pourrait-elle pas devenir un précurseur en matière de développement touristique ? Non pas en se spécialisant dans l’accueil exclusif des gays et lesbiennes, mais en utilisant ce succès comme une garantie de qualité auprès de tous les touristes potentiels ? « La clientèle gay est une cible parmi d’autres que nous envisageons d’accueillir : les amoureux de la nature, les seniors... Mais il est vrai que cette clientèle spécifique peut contribuer à développer le tourisme », souligne la présidente du CTR. Certains professionnels en sont même convaincus. Pour eux, cette clientèle a une capacité d’entraînement vers d’autres cibles. Les homosexuels sont souvent des précurseurs de tendance dans la mode, le design. Si la destination Réunion devient une destination à la mode, tout le secteur touristique pourrait bien bénéficier des retombées.
Edith Poulbassia
Une campagne de promotion auprès des agences et de la presse magazine
L’année 2006 a commencé par une prise de contact avec des agences de voyages des tours opérateurs, et la presse gay à Johannesburg et à Cape Town, ce qui a donné lieu à la mise en place d’un partenariat de promotion, de communication et de vente de La Réunion dans les agences Pink Travel et Arokan Travels. En juillet, le CTR et l’Association Gay union se sont mis d’accord pour organiser des séances d’information sur l’homophobie et accueillir les visiteurs. Le mois d’août a été l’occasion pour le CTR de s’inscrire à l’IGLTA (International gay lesbian tourism association), réseau international de professionnels du tourisme entièrement à destination du public homosexuel. Ce qui permet au CTR de bénéficier d’un réseau puissant pour développer son activité et mettre en place des partenariats.
La Réunion est désormais citée en exemple dans la plupart des articles et émissions consacrées au tourisme gay friendly (Tour Hebdo, Pink TV, Illico, Têtu, Gay Pages, etc...). Plusieurs villes (Anjou, Paris, Rouen, Montpellier, Lille) ont pris contact avec le CTR, considéré comme précurseur dans le domaine du tourisme gay friendly, pour s’inspirer de la Charte. Le Comité du tourisme de Gers en a d’ailleurs mis une en place, identique à celle de La Réunion, depuis octobre 2005. Enfin, des tours opérateurs consacrent des pages dans leur catalogue à La Réunion (ManTours en Allemagne), et d’autres tours opérateurs américains, sud-africains et franco-libanais veulent intégrer La Réunion à leur programme l’année prochaine.
Le trio Paris-Réunion-Cape Town : un atout pour l’île terre de tournage
C’est le projet du tour opérateur Attitude Travels. Combiner ces 3 destinations complémentaires, avec au final un bénéfice considérable pour La Réunion. Cape Town est une destination urbaine et balnéaire, lieu de villégiature des Sud-africains et destination de touristes du monde entier. « La province de Cape Town attire le monde de la publicité et de la mode internationale. Cette région est le premier studio photo et audiovisuel à ciel ouvert au monde. Ce secteur d’activité prospère réunit une intelligentsia gay internationale particulièrement active dans cette profession. Ils sont d’ailleurs très intéressés par La Réunion pour sa proximité et la diversité de ses paysages, complémentaires de ceux du Cap. Cette niche est dans les projets du Conseil régional qui cherche à promouvoir La Réunion comme terre de tournage. Cape Town est un lieu privilégié pour capter une clientèle internationale ».
Tourisme et chikungunya
Les PME demandent le maintien des aides de l’Etat
Regroupée au sein de l’association DEFIT Réunion depuis cette année, une centaine de professionnels du tourisme, tous secteurs confondus (hébergement, location, véhicules, commerces, restauration, activités de loisirs), a tenu à faire un bilan de l’année 2006 marquée par le chikungunya. Ces travailleurs indépendants ont vu leur activité menacée par la crise, près de 2.000 entreprises dont 80% ont moins de 2 salariés. Si elles ont pu continuer leur activité jusqu’à maintenant pour la plupart, c’est grâce aux aides financières que l’Etat leur a attribuées. Mais le gouvernement n’a pas encore informé les professionnels du tourisme sur les suites à donner à ces aides l’année prochaine.
Pour DEFIT Réunion, les PME sont loin d’être sorties de la crise économique et ce malgré la compagne de communication du CTR qui, pour l’instant, vient d’être lancée. « En octobre et en novembre, nous nous attendions à une reprise de l’activité, mais il n’y a rien d’exceptionnel, juste un léger frémissement », explique l’association. Trois raisons rendent compte de cette situation : la fin de l’année est traditionnellement une période de fréquentation touristique, beaucoup de touristes qui avaient repoussé leur voyage à cause du chikungunya se sont retrouvés avec une date butoir pour l’utilisation de leurs billets d’avion, de sorte que certains en ont finalement profité, et puis la clientèle locale qui profite le week-end des structures. Selon une étude réalisée par DEFIT Réunion auprès de ses adhérents, l’association constate que la perte de chiffre d’affaires est en moyenne quasiment constante sur l’année. Le 4ème trimestre est marqué par 36 à 40% de perte de chiffre d’affaires. « A cette même période de l’année, nous avons déjà fait le plein de réservation à 80% pour les mois de janvier et février et nous commençons pour le mois de mars. Actuellement, nous ne sommes qu’à 17% de réservations pour février et 20% pour mars », précise DEFIT Réunion.
Pour l’année prochaine, DEFIT Réunion espère être associé aux décisions de modernisation du secteur touristique, notamment pour le DOCUP 2007-2013. L’association veut ainsi mener une réflexion de fond sur l’activité touristique à La Réunion qui concernerait d’autres domaines comme l’environnement, l’aménagement. Pourquoi pas travailler sur la mise en place d’un tourisme de proximité, dans chaque ville, pour que « même si un touriste revient 10 fois dans l’île, il aura encore envie d’y revenir ». DEFIT Réunion compte entre autres sur les Assises du tourisme qui étaient prévues en août et qui, finalement, devraient se tenir en février prochain, pour exposer ses propositions.
E.P.