vendredi 28 décembre 2007

Témoignage de prsionniers gays au Cameroun



Cameroun: paroles de prisonniers gays.



Au Cameroun, au moins 18 hommes sont actuellement en prison pour «homosexualité».

Voici les témoignages de trois d'entre eux.

Premier témoignage : «N.J.» Je me nomme N.J.. Je suis âgé de 19 ans

J'habitais avec mes parents et ma sœur à 15km du centre d'Ebolowa. J'étais élève en classe de 2nde A au collège C…
Le 9 juillet 2006, j'ai été abordé au soir par un jeune homme de 23 ans qui se nommait O.G. Il m'a proposé la somme de 30.000 francs CFA (45 euros) pour avoir des rapports sexuels avec lui. J'ai tout de suite accepté et nous avons pris une auberge au centre où tout s'est bien passé.
Au matin du 10 juillet, il m'a tendu 10.000 francs CFA (15 euros), promettant de me donner le reste ultérieurement. J'ai exigé qu'il remplisse les clauses d'un contrat parce que je ne le connaissais guère. Comme il ne s'exécutait pas, j'ai alerté les passants afin qu'ils m'aident à le maîtriser. Ce sont eux qui nous ont conduit à la police judiciaire.
Nous avons été gardés à vue après quelques explications verbales et des menaces, et ce n'est que le jour suivant que nous avons été entendus pour un procès verbal, puis gardés à vue à nouveau. Le 13, pendant que O.G. attendait à la salle d'accueil et qu'on entendait ma déposition, il a profité de la distraction des agents pour s'enfuir. Ils ont voulu que je leur dise où il habitait, ce à quoi j'ai répondu que si je le savais, je ne serais pas en cellule. À la suite de cela, j'ai été torturé à coups de matraque pendant plusieurs minutes pour me faire avouer je ne sais quoi. C'est fou de penser que je protège celui par lequel je me suis retrouvé là.
Ce même jour, j'ai été entraîné au parquet, où le procureur m'a fait signer un mandat de dépôt pour homosexualité. J'ai été conduit à la prison centrale d'Ebolowa au quartier des majeurs, bien qu'à ce moment-là je n'avais que 18 ans.
Dix-hui jours plus tard, je suis allé au parquet. La procureure, maître A., m'a demandé d'abandonner mes préférences homosexuelles après avoir lu ce que j'avais déclaré à la police judiciaire. Je lui ai dit que je ne pouvais pas parce que je suis homo et que je n'ai aucune attirance pour les femmes. Elle m'a condamné à 15 ans fermes d'emprisonnement.
En fin d'année, j'ai bénéficié de 1 an de remise de peine, en plus des 16 mois que j'ai déjà purgés, ce qui fait 2 ans et 4 mois à ce jour. J'ai été autorisé à être «corvéable à merci» pour éviter la vie que j'endure en prison. Les insultes, la drague, l'humiliation… sont quelques-unes des choses que je vis en prison. Je suis malheureusement tombé gravement malade et j'ai demandé une interruption car je travaille dur.
Vu que je suis abandonné par ma famille qui n'est venue que le premier mois, le temps de ma lourde condamnation, et que je suis sans moyen, je souhaiterais négocier le détachement. J'aimerais à ma sortie de prison suivre une formation en informatique, tout en vivant loin de ma famille qui ne m'accepte plus à cause de mon choix sexuel. La vie est très difficile en taule où je dois me contenter d'un repas par jour. Le paludisme, les démangeaisons, les vertiges, la gale… sont mon lot quotidien.
L'analyse d'Alice Nkom, avocate et défenseure des homos au Cameroun :
«L'interpellation et la mise en détention provisoire de N.J. sont illégales. Au contraire, c'est lui-même qui est victime d'une infraction civile, l'exécution d'un contrat verbal de paiement d'une dette. Aucun élément du récit ne démontre un flagrant délit d'homosexualité. Or l'article 12 du Code de Procédure pénale ne permet au procureur de la République de décider d'une détention provisoire qu'en cas de crime ou flagrants délits.
«La procédure ayant abouti à la détention, puis à la condamnation de N.J. est donc nulle. Le juge a l'obligation de l'invoquer et de casser cette décision! Le fait que N.J. ait avoué son homosexualité n'y change rien. Avouer qu'on est homosexuel n'est pas, en soi, un délit et ne donne pas aux poursuivants le droit de violer la procédure pour ôter la liberté à quelqu'un: le Cameroun n'est pas un État islamique et ce n'est de la charia qu'il s'agit! Quel dommage que N.J. n'ait pas fait appel et ait ainsi accepté, parce qu'il se sait homosexuel et n'a pas envie de le cacher, sa culpabilité en tant qu'homosexuel!
«Je suis sûre que le Tribunal a considéré qu'il s'agit d'un délit continu (cf. ses aveux à la police) et qu'il ne fallait donc pas envisager de sortir de prison des gens qui, de toutes façons, allaient recommencer, pour ne pas dire continuer à être homosexuel...!
«La place de N.J n'est pas en prison, mais bel et bien à l'école, et tout de suite, la procédure étant entachée d'une nullité absolue, violant ses droits fondamentaux.»Deuxième témoignage: «E.A.»
Je suis E.A., anglophone de 31 ans et je vis avec ma femme et ma jeune fille à Ebolowa, au quartier New-Bell (camp police) à environ 1km de ma boutique car je suis commerçant. J'emploie deux Sudistes.
Je me suis plaint contre un de mes employés, caissier, parce qu'après l'inventaire, il y avait fuite d'un peu plus de 130.000 francs CFA (200 euros). Il a été arrêté et, quelques jours plus tard, son frère m'a rencontré pour un arrangement à l'amiable et demandé de faire libérer son cadet qui était en fait déjà libre, sans que je le sache.
Alors que je suis à la boutique, mon voleur arrive et me fait savoir qu'il a été libéré parce qu'on n'enferme plus les gens comme ça avec le nouveau code de procédure pénale [qui est censé s'assurer que les personnes arrêtées aient été prises en flagrant délit, et bénéficient de la présomption d'innocence, NDLR]. Il me dit, après avoir tout avoué qu'il va s'entendre avec ses frères et demain, ils viennent me régler.
Le lendemain, il arrive, puis son frère aîné demande à son cadet de se mettre à genoux pour me demander pardon et il m'a promis qu'une fois que lui et les autres membres de la famille auront fait la réunion, il viendra me donner mon argent.
La même nuit, à la fermeture du magasin après 21 heures, je faisais le contrôle de ma livraison et le petit voleur est resté alors que son collègue venait de partir, il m'a dit qu'il a faim. Je lui ai donné un bout de pain tartiné et je suis reparti derrière le comptoir pour faire les comptes de la journée. J'ai juste eu le temps de me rendre compte qu'il y avait une présence à mon dos, qu'il s'écrasait sur moi à moitié nu et me menaçait avec mon couteau. Il a crié deux noms et six personnes sont entrées dans la boutique, deux de ses frères y compris. Ils m'ont déshabillé et m'ont traîné hors de la boutique et le petit appelait le quartier en criant au viol.
B.Z. un des voisins de ma boutique, tradi-praticien, est arrivé et m'a libéré de mes bourreaux et je suis parti en courant prendre son pantalon sur la corde et suis parti au camp de police pour me plaindre. C'est là que le commissaire central, un procureur et trois policiers sont venus me prendre pour m'entraîner en cellule; bien que j'avais perdu 150.000 francs CFA que j'avais sur moi au moment de l'agression, et que ma boutique était restée ouverte.
Je me retrouve alors en prison avec monsieur B.Z. en tant que «complice pour pratique d'homosexualité» car, disent-ils, c'est lui qui me pousse à me livrer à de telles pratiques. C'est à ce moment que j'ai compris que j'étais victime d'un coup monté.
Depuis lors, j'attends, croupi en taule où j'essuie injures de tout genre et humiliations, sans parler des démangeaisons, de la toux, la mauvaise nourriture, la dépression, entre autres...
L'analyse d'Alice Nkom:
«La situation juridique et procédurale est encore plus rocambolesque que dans le premier témoignage. Elle illustre bien l'arnaque, et le chantage dont on peut être victime au Cameroun sur la base de soupçons d'homosexualité!
«Le droit est absent de l'ensemble de ce dossier: la procédure de flagrant délit n'a apparemment pas été suivie, au profit de celle de l'information judiciaire, puis qu'il ne mentionne aucune convocation, aucune déposition ni aucun jugement, depuis sa mise en détention provisoire… Dans ce deuxième témoignage, c'est le code de procédure pénale qu'on assassine!»Troisième témoignage: «E.B.S.»
Mon nom est E.B.S., je suis âgé de 35 ans et j'habite avec mon père dans un village à une dizaine de kilomètres d'Ebolowa. Je vis de travaux champêtres.
Comme il m'est difficile de vivre mon homosexualité dans ce petit coin où tout le monde connaît tout le monde et où tout se sait, je m'évade de temps en temps vers la grande cité où il m'est facile de trouver des partenaires, surtout que je me suis fait prendre une fois ce qui fait que tout le monde m'évite, je suis isolé, mis en quarantaine.
Le week-end du 12 au 14 octobre, je suis allé chez ma cousine au quartier Nko'ovos dans le but de me reposer. Le dimanche 14, je suis sorti ce soir dans le but d'assouvir mes désirs. Je me suis rendu au centre commercial, au cabaret Evasion.
Pendant que je dansais, je me suis adressé à un jeune homme d'environ 30 ans se trouvant près de moi. Il m'a dit qu'il était Malien bien que j'aie cru qu'il était du Nord-Cameroun. Je lui ai fait la cour en lui disant que je voulais dormir chez lui en sa compagnie et que je lui donnerais 2.000 francs CFA (3 euros) s'il était d'accord. Il m'a entraîné au-dehors où il a porté la main sur moi et la bagarre a commencé. Le monde qui est venu savoir ce qui se passait nous a entraîné au commissariat central non loin de là.
J'ai passé là 8 jours. Le 22 octobre 2007, j'ai signé le mandat de dépôt pour tentative d'homosexualité et j'ai été conduit à la prison où je me trouve encore. Le 23, je suis monté au parquet, j'ai été entendu. Mon plaignant était présent. Après lui, j'ai été d'accord avec sa version de faits. J'ai eu un renvoi pour le 13 septembre et ce jour, j'ai été mis en délibéré pour le 27 novembre 2007 [la décision a depuis été reportée, NDLR].
Je n'ai pas le moral car je suis abandonné par mon père et toute la famille qui m'a longtemps menacé de rompre avec la pratique. En plus, ma santé se détériore de plus en plus parce qu'en plus de la gale, du paludisme et des démangeaisons qui sont mon lot quotidien, je souffre d'habitude d'hypertension et d'un début de diabète.
J'aimerais à ma sortie de prison m'investir dans un commerce et surtout, vivre loin de ma famille qui souhaite que je croupisse en taule car, disent-ils, je suis la honte de la famille et du village.
L'analyse d'Alice Nkom :
«Là encore, tous les arguments que j'ai cités dans les deux premiers cas sont valables: il n'y a pas de tentative d'homosexualité si vous avez seulement fait la cour à quelqu'un: les conditions de l'arrestation, de la garde à vue, de la mise en détention provisoire sont illégales et violent toutes les dispositions du code de procédure pénale.»
Témoignages recueillis par Marc Lamba Lambert pour l'association Alternatives-Cameroun.

Pour faire un don à cette association, contactez-la par mail à l'adresse

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lundi 10 décembre 2007

Congé parental et homosexualité....



Congé paternité et homosexualité
Le bonheur n’est pas dans le pré, mais dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2002. Pas convaincu ? Suivez cette drôle d’histoire, qui conduit à réfléchir sur la légalisation du mariage homosexuel.
C’est cette loi de 2002 qui a créé le congé paternité : après la naissance d'un enfant et dans un délai de quatre mois, l’heureux papa peut bénéficier d’un congé de paternité de 11 jours consécutifs. Pendant cette période, consacrée à couver le bébé et à choyer la maman, le petit veinard perçoit les indemnités journalières de l'assurance maternité. Vive l’article L. 331-8 du Code de la Sécurité sociale !
Bingo. C’est la naissance de Basile. Karine, qui a accouché, va pouvoir bénéficier de la présence du papa. Petit problème : le papa s’appelle Elodie ! Car c’est après une insémination artificielle pratiquée en Belgique que Karine a pu enfanter. Karine et Elodie sont pacsées, mais restent les chromosomes. Problème.
La Caisse refuse le versement de la prestation : la loi, c’est la loi, et Elodie n’est pas un papa ! Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes, le 20 mars 2006, confirme ce refus, pour le même motif. Hier, l’affaire se plaidait devant la cour d’appel de Nantes, et l’arrêt est attendu pour le 30 janvier.

Que dit le droit ?

Le Code civil reste très arthrosique. Tout au plus, les articles 515-1 et suivants, issus de la loi du 15 novembre 1999 qui fonde le PACS, évoquent-ils une vie de couple, sans faire référence à la différence de sexe. Le valeureux Code en est encore rose d’émotion…
C’est le Code de la sécurité sociale – que du bonheur, vous dis-je – qui avait ouvert la voie, par la loi du 27 janvier 1993 : le concubin d'un assuré, hétérosexuel ou homosexuel, acquiert la qualité d’ayant-droit au titre de l’assurance maladie. Pour la prochaine Gay Pride, je veux un char à l’honneur de l’article L. 161-14, al. 2, du Code de la Sécurité Sociale.
Toujours aussi coquin, le Code de la Sécurité sociale a inclu un article L. 513-1 qui alloue la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), à la « personne physique qui assume la charge effective et permanente de l’enfant ». Sans évoque la question du sexe.


Du côté européen, ça avance plus vite.


L’article 12 de la Convention européenne des droits de l’homme pose le principe de la liberté matrimoniale, et par l’arrêt Goodwin du 11 juillet 2002, la Cour européenne des droits de l’homme en a déduit qu’un Etat ne pouvait s’opposer au mariage entre une femme et d’une transsexuelle opérée.
Dernière étape – pour le moment – avec l’arrêt rendu 7 janvier 2004 (Affaire C. 117/01) par la Cour de justice des Communautés européennes qui a condamné la discrimination à propos du droit à une pension de réversion au sein d’un couple formé par une femme et une transsexuelle. La Cour de Luxembourg vise les articles 13 § 1 du Traité de l’Union européenne et 21 de la Charte des droits fondamentaux, du 7 décembre 2000, pour conclure que toute discrimination fondée sur l’ « orientation sexuelle » est prohibée.

* * *

S’agissant de Karine et Elodie, toute la question est de savoir si la cour de Rennes en restera à la lecture littérale du Code, ou si elle prendra en compte la substance des principes posés par le droit européen.
Dans leur dossier, Karine et Elodie disposent désormais d’un élément de poids. Une délibération de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations (HALDE) reconnaissant le bien fondé de leur démarche. Et le bon président Schweitzer s’est fendu d’une lettre au premier ministre « concernant les disparités dans les conditions d’attribution des prestations sociales en lien avec l’éducation des enfants, aux couples de même sexe. »
Le plus simple serait que la loi change, ou lève le doute.
La lutte contre les discriminations de type social avance à grand pas, mais à terme elle pourrait servir de prétexte à ceux qui s’opposent au mariage homosexuel : l’égalité étant parfaite, la loi refuserait de passer le cap s’agissant d’un droit

mercredi 7 novembre 2007


Gays et lesbiennes âgés: Une génération à bichonner
Aux Etats-Unis, chercheurs et entrepreneurs s’intéressent de plus en plus près à ce nouvel enjeu social et démographique: les lesbiennes et gays âgés.

Nadja Simko
novembre 2007

Pour en savoir plus
Barbary Lane Senior Communities
http://www.asaging.org/
http://www.sageusa.org/
Avoir du temps à consacrer à leurs loisirs et intérêts, aux voyages ou à la détente. C’est ce qu’ont répondu les baby boomers de la communauté gay quand on leur a demandé ce que signifiait pour eux la retraite et le troisième âge*. Mais pas seulement. Parce que l’âge d’or, comme on se plaît à l’appeler, n’a pas le même éclat pour tous. «En vieillissant, les LGBT sont confrontés à toute une série de problèmes, dont la majorité ont trait à une crainte de la discrimination», observe Kimberly Acquaviva, professeure assistante à l’Université George Washington. «Et cette peur, fondée sur leurs expériences passées, fait qu’ils ne vont souvent pas demander l’aide dont ils ont besoin.»
D’une génération à l’autre«La situation varie d’une génération à l’autre», observe pour sa part Gerard Koskovich, responsable des questions LGBT pour la American Society on Aging (ASA). Et les seniors de 70, 80 ans ou plus ont en effet leur propre rapport au silence. Tenus tout au long de leur vie d’être discrets sur leur identité sexuelle, ils ont appris, normalisation sociale oblige, à ne s’ouvrir qu’à un cercle restreint de proches. Mais cette façon de vivre devient difficile lorsqu’il s’agit d’accéder à des soins ou d’intégrer une maison de retraite conventionnelle», explique Koskovich. Aussi ces seniors se sentent-ils parfois contraints de s’isoler de leur cercle de proches, de ceux qu’ils nomment leur «famille d’adoption», pour éviter d’afficher trop ouvertement leur homosexualité face aux structures d’aide et de soins.Et, bien que différente, la perspective des baby boomers LGBT n’est pas toujours plus enviable. «Plus jeune, cette population a, pour la plupart, affirmé plus ouvertement sa sexualité et son identité de genre, ajoute le professionnel de l’ASA. L’homosexualité, aux Etats-Unis et particulièrement dans les grandes villes, s’est vécue de façon presque communautaire, avec nombre d’associations et organisations.» Aussi en vieillissant, ces retraités, habitués à une attitude d’ouverture, recherchent-ils les institutions nécessaires au maintien de ce mode de vie. Sans toujours les trouver. Et le manque de structures adéquates les renvoie dès lors à la même peur: celle de la discrimination.


Un retour au placard


Dans une recherche publiée en 2006 par MetLife*, moins de la moitié des LGBT américains de la génération des baby boomers se disent confiants que le personnel soignant les traitera avec respect. «Ils craignent d’être rejetés ou traités avec moins d’attention ou de sympathie s’ils nomment leur homosexualité», observe Dan Ashbrook, directeur de Lavender Seniors of the East Bay, un réseau de soutien pour les LGBT vieillissants dans la région de San Francisco.A tel point d’ailleurs que certains même seraient prêts à passer sous silence leur orientation sexuelle. Comme si, après des années d’identité affirmée, ils se sentaient forcés de «retourner dans le placard». Selon des études, 90% des LGBT américains n’ont pas d’enfants (contre 20% pour l’ensemble des personnes âgées). Ce sont les lesbiennes qui se disent les plus angoissées par une possible discrimination à leur encontre. «Cela s’explique par la fait qu’elles font face à la ségrégation relative à leur identité sexuelle d’une part et vivent dans une société qui marginalise les femmes d’autre part, observe Gerard Koskovich. Elles cumulent donc les difficultés. Et, les différences salariales étant ce qu’elles sont, elles ont à redouter à la fois une vulnérabilité accrue et une précarité financière.» L’isolement et la solitude auxquels sont confrontés les LGBT en vieillissant peuvent aussi conduire à d’autres difficultés, d’ordre pratique notamment. Ainsi, sans précautions prises, personne n’est habilité à prendre de responsabilité en termes de décisions médicales. «En l’absence de personne désignée, la décision relative à des soins intensifs ou continus revient alors directement à la famille biologique, avec laquelle les liens de confiance sont souvent rompus», regrette Kimberly Acquaviva.Reste que, pour parer à ces difficultés, la communauté LGBT américaine s’organise peu à peu. Les maisons de retraite «gay-friendly» se multiplient et le pays compte désormais plusieurs résidences spécifiquement conçues pour les LGBT. «Aux Etats-Unis, où la diversité culturelle est si forte, les homes destinés à une population particulière ont une longue histoire. La communauté juive et les églises protestantes ont, il y a plus d’un siècle, créé les premières maisons de retraite. Les Italiens, les Arméniens et d’autres groupes d’immigrés ont suivi. Même les syndicats ont construit leurs propres homes. En ouvrant des maisons dédiées aux LGBT, nous ne faisons qu’épouser le système américain … à notre manière», conclut, avec une pointe d’ironie, Gerard Koskovich.


Home sweet home


Barbary Lane est une maison de retraite inspirée de la célèbre série de romans Chroniques de San Francisco, d’Armistead Maupin. D’ailleurs, les responsables de ce projet résidentiel ont pris soin de nommer les pièces selon les héros des Chroniques. «Nous avons voulu créer un établissement pour les LGBT du troisième âge avec des programmes spécifiquement adaptés à leurs besoins et intérêts – qu’il s’agisse d’événements culturels ou de réseaux d’aide», explique David Latina, président de Barbary Senior Communities, la société à l’origine de plusieurs projets de homes spécialisés. Cette maison de retraite qui accueillera ses premiers résidents au mois de février prochain, illustre un phénomène relativement récent: la multiplication des homes spécifiquement dédiés aux LGBT. «Très schématiquement, on parle de trois générations, observe David Latina. Celle des LGBT dits «GI’s», de la deuxième guerre mondiale, âgés de 90 ans ou plus et dont la caractéristique est un conformisme auto-protecteur. Puis est venue la génération silencieuse, qui a dissimulé son homosexualité et accepté une forme de normalisation sans pourtant l’approuver, suivie des baby boomers. Ces derniers ont transformé la notion de maison de retraites.» Par leur volonté d’afficher leur identité et, surtout, leur esprit d’indépendance, ils ont imposé les notions de choix individuels et de besoins propres à une communauté. Mais surtout, comme le précise le président, en 2000 la population des LGBT a, pour la première fois, été quantifiée par le recensement américain. Ainsi, on chiffre à plus de trois millions les LGBT de plus de 65 ans. En 2030, cette même population devrait compter six millions d’individus*. Et qui dit quantifier une population spécifique dit identifier un marché. Aussi y a-t-il fort à parier qu’à l’avenir Anna Madrigal et Michael Mouse pourront enfin choisir, pour leurs vieux jours, entre de nombreux «sweet homes». N.S.
http://www.barbarylanesenior.com/

lundi 22 octobre 2007

L'homosexualité à l'île Maurice.... Témoignage





Faire mieux comprendre l’homosexualité
Lorsqu’ils entendent prononcer le mot “gay”, bon nombre de Mauriciens ont à l’esprit l’image caricaturale de la ‘grande folle’, incarnée à l’écran par feu Michel Serrault dans le film “La Cage aux Folles”. C’est justement ce cliché-là et d’autres mauvaises conceptions que Laurent Laroche, le nouveau président du Collectif Arc-en-Ciel, veut briser.
Laurent Laroche, n’a rien d’efféminé. Ni dans son physique, ni dans son comportement général. Et pas même dans ses intonations. Et pourtant, il vit et assume pleinement son homosexualité.
Oui, reconnaît-il, il est un homo comme ils disent. “Lorsqu’une personne m’interroge à demi-mot sur mon orientation sexuelle ou en me montrant son index à la phalange recourbée, je réplique qu’effectivement, je suis p... Le terme ne me dérange plus. Autrefois, je ne l’aurais jamais admis. Pas même à un autre homosexuel”. Cette assurance tranquille est assez récente chez lui. Elle date en fait de sept ans. Un nouvel état d’esprit résultant d’une rencontre. Avant ça, Laurent était d’une timidité maladive et craignait toujours de déranger par sa seule présence. Laurent refuse toutefois d’établir une corrélation entre ce mal-être qu’il a traîné jusqu’à l’âge de 21 ans et les abus sexuels répétés dont il a été victime à partir de l’âge de six ans. “Je n’avais que six ans lorsqu’un cousin, de dix ans mon aîné, a fait des attouchements sur ma personne. Je croyais que c’était un jeu. Cela s’est répété. Le plus dur, c’était quand je ne le voulais plus et que c’était forcé. Les abus ont duré longtemps et puis ce fut le viol”. A l’adolescence, Laurent se sent attiré émotionnellement par les filles avec qui il sort et a même des rapports sexuels. Mais en parallèle, il sort aussi avec des garçons mais là, précise-t-il, c’est purement sexuel. Lorsque sa mère le questionne sur son orientation sexuelle après avoir lu un article sur l’homosexualité dans un magazine féminin, il lui dit la vérité. Et pour lui faire plaisir, il accepte de consulter un psychologue et même un prêtre. Cela ne l’empêche pas de continuer à mener sa double vie. “ J’avais du mal à me situer et à savoir quelle était mon orientation sexuelle”. Le théâtre, que cet ancien élève du collège St-Joseph pratique, l’aide dans une certaine mesure à briser sa timidité. Sa sœur aînée l’entraîne dans son sillage lorsqu’elle sort et cela l’oblige à ne pas vivre en ermite. Le fait que sa sœur et son petit ami acceptent sa bisexualité est aussi pour lui un soulagement. Mais il a beau avoir des relations avec des filles et des garçons, il se sent toujours différent des autres. Lesdites relations ne l’apaisent pas. Et même le théâtre qu’il fait auprès de plusieurs troupes, bien que plaisant, n’amène pas le résultat escompté. “Bien que mes amies et mes petits copains étaient au courant de ma bisexualité, en public, je me conformais à ce que la société attendait de moi”. Lorsqu’il rencontre Clarel Broudou, le metteur en scène et directeur de la troupe Artistes en Liberté, ce dernier est le seul à lui faire confiance. “Alors que les autres me critiquaient ouvertement, lui, m’a encouragé et m’a fait confiance. Il a suffi de cela pour que j’aie confiance en moi”. A travers Clarel Broudou, qui est devenu son meilleur ami, il rencontre l’homme qui partage aujourd’hui sa vie à mi-temps. “Pas en raison du qu’en-dira-t-on mais pour des raisons pratiques”. Laurent déclare n’avoir eu aucune difficulté à vivre son homosexualité. Pas même à la firme où il est travaille. “Au bureau, je me sens un peu à l’écart car certains hommes ont du mal à accepter l’idée générale de l’homosexualité. Mais une fois qu’ils me connaissent, ça va. D’autres m’évitent, de peur d’être catalogués d’homosexuels. Mais je ne prends pas cela comme de l’homophobie car c’est un choix personnel. Tant que l’on me dit bonjour, ça va. Avec mes collègues filles, ça se passe super bien”. Il ajoute ensuite qu’en groupe, les gens ont tendance à se prononcer contre l’homosexualité. “Lorsque tu les interroges individuellement, cela ne les dérange pas. Comme quoi, la pression du groupe est plus forte. Beaucoup de personnes acceptent les travestis et pas les homosexuels car dans leur tête, un homosexuel est génétiquement mal constitué et doit forcément vouloir changer de sexe pour devenir femme. Ce n’est pas vrai”. Il n’est pas du genre à s’afficher. Bien que lui et son copain soient très tactiles, ils ne se promèneront pas bras-dessus, bras-dessous, ni ne se bécoteront en public. “ La société dans laquelle on vit n’a pas encore évolué et n’accepte pas l’homosexualité. Tout comme ce n’est pas bien vu de marcher en bikini à Port-Louis. Que tu sois homosexuel ou hétéro, tu dois respecter les autres. C’est une question de pudeur et de respect”. Laurent aurait pu mener sa petite vie tranquille, sans se soucier d’autrui. “J’ai toujours pensé qu’il me fallait aller vers les autres. Je refuse que ma vie ne se résume qu’au travail et qu’à ma relation amoureuse”. Lorsqu’il apprend que le mouvement qui va devenir le Collectif Arc-en-Ciel est en gestation, il s’y intéresse et assiste aux réunions. Il est agréablement surpris par la composition du premier comité de direction. “J’ai été agréablement surpris de voir que chaque groupe était représenté et qu’il y avait une réelle volonté de faire changer les mentalités”. La première année de la constitution du collectif, Laurent se porte volontaire comme trésorier. La deuxième, il agit comme porte-parole. Cette année, il a été élu président. Le message du collectif reste inchangé. Il veut que l’homosexuel ait une reconnaissance légale. “Nous attendons avec impatience l’Equal Opportunity Bill qui devrait aplanir toutes les difficultés pour nous”. Tout comme il réclame la dépénalisation de la sodomie. Pour mieux faire connaître le collectif, Laurent veut aussi le faire enregistrer auprès du Mauritius Council for Social Service. Et pour venir à bout de l’homophobie, il pense à des campagnes d’explications auprès des familles qui s’interrogent sur l’orientation sexuelle de leur enfant, de même qu’auprès des jeunes. “Il faut expliquer ce qu’est l’homosexualité, montrer que ce n’est pas une perversion, ni une déviation sexuelle. Que cela n’a rien à voir avec le sexe mais que c’est une histoire d’amour entre deux personnes de sexe identique. Il faut expliquer ce qu’est chaque composante de la communauté des LGBT pour éviter les amalgames”. Laurent porte un regard surprenant sur l’homophobie. Le plus grand homophobe, selon lui, est l’homosexuel lui-même. “Il ne s’accepte pas car il est mal dans sa peau. Comment ne pas l’être quand la société l’a conditionné à être pendant longtemps ce qu’il n’est pas ? C’est ça, aller contre sa nature. Mais il est si mal dans sa peau qu’il n’accepte généralement pas les autres travestis, lesbiennes, bisexuels. Comment voulez-vous qu’on l’accepte s’il ne supporte pas les gens qui sont pratiquement comme lui ?”. Laurent ajoute que le collectif a aussi été créé pour une plus grande solidarité entre les différents groupes le constituant . “Le changement doit aussi s’opérer à l’intérieur de la communauté des LGBT”, dit Laurent.
-->Marie-Annick SAVRIPÈNE

vendredi 19 octobre 2007

Quand l'Europe sacrifie les gays polonais !







Sur fond de traité simplifié, les homos polonais ignorés
Union européenne.
Florence Tamagne Université Lille-III

Fruit de longs mois de négociations, le «traité simplifié», présenté comme une victoire de Sarkozy, repose sur un compromis en forme d'abdication de la part de l'Union européenne face à la Pologne des jumeaux Kaczynski (du parti Droit et justice, PiS, conservateur). Elle n'appliquera pas la charte des droits fondamentaux, en particulier les dispositions concernant les droits des minorités sexuelles.


1. Quelles sont les discriminations ?


Bien que l'article 32 de la Constitution et le code du travail dénoncent toute forme de discrimination, 13 % des gays et des lesbiennes polonais ont déjà subi des violences physiques, plus de 50 % des violences psychologiques et plus de 80 % jugent nécessaire de dissimuler leur orientation sexuelle sur leur lieu de travail. Dans un pays à très forte majorité catholique, l'homosexualité continue d'être vue comme un péché. Les dernières marches pour l'égalité (l'équivalent de la Gay Pride) ont été le théâtre de violentes attaques organisées par les jeunes skinheads de la Ligue des familles polonaises (LPR), ancienne alliée du PiS : jets de pierres et d'œufs pourris, slogans haineux aux relents antisémites («Gazons les pédés !») et antieuropéens («Pédophiles et pédérastes, voilà les euroenthousiastes !»), sous les yeux de forces de police visiblement peu enclines à intervenir.


2. Y a-t-il homophobie d'Etat ?


En 1932 la Pologne, sous l'influence du code pénal napoléonien, était l'un des premiers pays d'Europe à décriminaliser l'homosexualité. Aujourd'hui, la presse de droite n'hésite pas à affirmer qu'il s'agit d'une importation occidentale, étrangère à la tradition polonaise, et elle dénonce l'action du «lobby rose international», qui aurait infiltré les institutions européennes. Le chef de la LPR, Roman Giertych, ancien ministre de l'Education, a été limogé en août, mais le Premier ministre, Jaroslaw Kaczynski, n'exclut pas de ressusciter son projet d'interdire la «promotion de l'homosexualité à l'école». Son frère jumeau, le président Kaczynski, est lui aussi un homophobe notoire qui demeure persuadé que l'homosexualité conduit l'humanité à son «extinction». Parmi les partis en lice pour les législatives du 21 octobre, seule la coalition de centre gauche (Gauche et démocrates, LiD) s'affirme contre l'homophobie et pour les droits des homosexuels, mais elle a peu de chance de l'emporter.


3. Comment tentent de réagir les militants gays et lesbiens ?


Aujourd'hui, les groupes gays et lesbiens sont peu nombreux ; une subculture avec des pubs ou des clubs homosexuels n'existe que dans les grandes villes. Pour les deux principales organisations lesbiennes gay, bi et trans (LGBT), Lambda Warszawa et Campagne contre l'homophobie (KPH), il est essentiel non seulement de créer une identité homosexuelle positive, mais aussi de mobiliser l'opinion. En 2010, l'Euro Pride se tiendra à Varsovie, choix qui a valeur de symbole, puisque la Pologne sera le premier pays d'Europe de l'Est à accueillir la manifestation. Pour Tomasz Szypula, secrétaire général de KPH, «le plus important est que nous avons une chance d'être plus visibles et de créer une vraie communauté avec des leaders, ce qui nous permettra d'être assez forts pour influencer la politique polonaise. Je compte aussi sur les organisations LGBT de toute l'Europe pour qu'elles nous témoignent leur solidarité. L'Euro Pride à Varsovie sera un retour aux racines de l'idée de "fierté". Cela ne sera pas seulement un moment de joie, mais aussi un cri fort pour demander le respect». -- Voilà comment l'europe renie ses principes humanistes au profit d'un pays homophobe !

Amitiés de René

samedi 6 octobre 2007

dimanche 23 septembre 2007

vendredi 14 septembre 2007

Homosexualité en Jamaïque...



Gloire à la musique de Jah !
Made in Jamaica. Le film énergique de Jérôme Laperrousaz donne à voir la Jamaïque d’aujourd’hui à travers les textes de grands artistes de l’île qui a vu naître l’illustre Bob Marley. Le réalisateur revient sur la conception et les thèmes abordés dans son œuvre.

DOSSIERS Cinéma

Comment vous est venue l’idée de faire un tel film ?
En 1977-1978, j’ai rencontré Marley et on avait décidé de faire un film ensemble. Je trouvais que cette musique était intéressante par sa rythmique, comme un battement de cœur, et ses textes sur l’esclavage et sur la vie quotidienne. Un peu plus de 25 ans plus tard, j’ai trouvé important de faire un constat sur cette musique écoutée partout dans le monde. Toutes les générations dansent dessus, c’est une musique fédératrice qui touche quelle que soit notre origine ou notre culture. C’est une musique extrêmement puissante qui symbolise le rayonnement de la Jamaïque, qui a pour beaucoup construit son identité sur sa musique. Elle a subi quatre siècles d’esclavage et n’est indépendante que depuis 1962. Donc il est extrêmement intéressant que la société se reconstruise à travers le reggae, issu des ghettos de Kingston et un peu de la campagne. Au final, aussi bien le reggae de Marley ou la dancehall sont nés dans les ghettos. Ce dont les chanteurs parlent convient à tous les ghettos du monde, que ce soit celui de Seine-Saint-Denis, de New-York ou d’Amérique du Sud. Cette musique a une portée universelle.
Dans le film, on a l’impression que les artistes sont comme des dieux. Notamment quand le chanteur de dancehall Bogle est abattu, on voit les gens complètement effondrés…
Ces artistes ne sont pas des dieux, mais des icônes très respectées, des stars et des leaders d’opinion très importants pour le peuple des ghettos de Jamaïque. La population fait attention à ce qu’ils peuvent dire, car leur musique est un commentaire de la vie quotidienne.
L’esclavage est toujours très présent dans les chansons…
L’esclavage n’est ni une chose à oublier ni à négliger. Le pays n’est indépendant que depuis 1962. Il est passé de l’esclavage à la colonisation et là il est dans une situation post-coloniale. Donc c’est normal qu’il y ait cette envie de raconter ce passé, cela fait partie de la construction identitaire de savoir qui on est et où on va. Les artistes parlent aussi beaucoup de l’esclavage mental, de ce que l’on peut vivre dans un pays du tiers-monde où les choses sont parfois très difficiles.
Dans les chansons du film, on n’en entend pas une seule qui est homophobe, alors que certains artistes ont des textes très violents envers les homosexuels. Pourquoi ?
Je suis contre toute forme de discrimination. Je suis complètement opposé à l’homophobie, que je trouve inacceptable. Les avancées sociales sont plus rapides dans les pays occidentaux avancés. Mais quand on va en Jamaïque, on se rend compte que les choses évoluent. La Jamaïque est un pays assez archaïque où la religion prend une grande place et il est regrettable qu’on applique les préceptes de la bible – qui disent qu’un homme ne doit pas aimer un homme et qu’une femme ne doit pas aimer une femme. Mais au-delà de ça, les choses bougent dans le bon sens. Les textes dont vous parlez date de quatre ou cinq ans. Et les artistes et les associations d’homosexuels (notamment l’organisation britannique OutRage !) ont passé un accord en présence de Scotland Yard (la police londonienne, ndlr) pour qu’il n’y ait plus de textes homophobes chantés. Et je pense que les associations gay ont bien fait de réagir vivement et il faut encourager à faire bouger les choses.
Aviez-vous songé à parler de l’homophobie dans votre film ?
J’ai souhaité traiter l’homosexualité, mais je ne voulais pas le faire de façon superficielle. Or cela prend du temps, il m’aurait fallu 50 ou 60 minutes et je ne pouvais pas me le permettre. Mais encore une fois, les choses bougent et l’homosexualité et les homosexuels sont de plus en plus acceptés. Il y a une espèce de mode de l’homosexualité chez les femmes, qui la vivent comme une émancipation vis-à-vis des hommes. Lady Saw et Tanya Stephens (qui apparaissent dans le film) jouent d’ailleurs un rôle important dans l’émancipation des femmes. Je pense que l’avenir de la Jamaïque passe par les femmes.
Des artistes, dont Lady Saw, parlent de sexe de façon hardcore comme les hommes parce que les textes mielleux n’ont pas la cote…
Cela fait partie de l’émancipation. Je ne suis pas des gens qui considèrent avec mépris ou condescendance ceux qui parlent librement de sexe. Surtout que leurs textes sont une vraie poésie de la rue. Ces artistes mettent les femmes dans une position où elles revendiquent le droit au sexe, au plaisir et donnent leur regard sur les hommes. Certaines de ces chansons sont devenues des hymnes pour les femmes en Jamaïque. Lady Saw a été bannie des radios et des festivals à cause de ce qu’elle chantait mais elle a fini par gagner parce qu’elle était soutenue par les femmes, et aussi par les hommes, parce qu’elle est très bonne dans le dancehall. Aujourd’hui, c’est une porte-parole des femmes qui utilise sa musique comme outil de libération des femmes.
Le film est un véritable clin d’œil au rêve jamaïcain. Comment définiriez-vous ce rêve ?
C’est la volonté de s’en sortir, de quitter le ghetto et de devenir une star. Comme dit Elephant Man, « j’ai prié pour que Dieu fasse de moi une star, et il m’a exaucé ».
Habibou Bangré, afrik.com


Homosexualité en Jamaïque....

Gloire à la musique de Jah !
Par vendredi 14 septembre 2007 101 lectures

Made in Jamaica. Le film énergique de Jérôme Laperrousaz donne à voir la Jamaïque d’aujourd’hui à travers les textes de grands artistes de l’île qui a vu naître l’illustre Bob Marley. Le réalisateur revient sur la conception et les thèmes abordés dans son œuvre.



DOSSIERS
Cinéma
Comment vous est venue l’idée de faire un tel film ?
En 1977-1978, j’ai rencontré Marley et on avait décidé de faire un film ensemble. Je trouvais que cette musique était intéressante par sa rythmique, comme un battement de cœur, et ses textes sur l’esclavage et sur la vie quotidienne. Un peu plus de 25 ans plus tard, j’ai trouvé important de faire un constat sur cette musique écoutée partout dans le monde. Toutes les générations dansent dessus, c’est une musique fédératrice qui touche quelle que soit notre origine ou notre culture. C’est une musique extrêmement puissante qui symbolise le rayonnement de la Jamaïque, qui a pour beaucoup construit son identité sur sa musique. Elle a subi quatre siècles d’esclavage et n’est indépendante que depuis 1962. Donc il est extrêmement intéressant que la société se reconstruise à travers le reggae, issu des ghettos de Kingston et un peu de la campagne. Au final, aussi bien le reggae de Marley ou la dancehall sont nés dans les ghettos. Ce dont les chanteurs parlent convient à tous les ghettos du monde, que ce soit celui de Seine-Saint-Denis, de New-York ou d’Amérique du Sud. Cette musique a une portée universelle.
Dans le film, on a l’impression que les artistes sont comme des dieux. Notamment quand le chanteur de dancehall Bogle est abattu, on voit les gens complètement effondrés…
Ces artistes ne sont pas des dieux, mais des icônes très respectées, des stars et des leaders d’opinion très importants pour le peuple des ghettos de Jamaïque. La population fait attention à ce qu’ils peuvent dire, car leur musique est un commentaire de la vie quotidienne.
L’esclavage est toujours très présent dans les chansons…
L’esclavage n’est ni une chose à oublier ni à négliger. Le pays n’est indépendant que depuis 1962. Il est passé de l’esclavage à la colonisation et là il est dans une situation post-coloniale. Donc c’est normal qu’il y ait cette envie de raconter ce passé, cela fait partie de la construction identitaire de savoir qui on est et où on va. Les artistes parlent aussi beaucoup de l’esclavage mental, de ce que l’on peut vivre dans un pays du tiers-monde où les choses sont parfois très difficiles.
Dans les chansons du film, on n’en entend pas une seule qui est homophobe, alors que certains artistes ont des textes très violents envers les homosexuels. Pourquoi ?
Je suis contre toute forme de discrimination. Je suis complètement opposé à l’homophobie, que je trouve inacceptable. Les avancées sociales sont plus rapides dans les pays occidentaux avancés. Mais quand on va en Jamaïque, on se rend compte que les choses évoluent. La Jamaïque est un pays assez archaïque où la religion prend une grande place et il est regrettable qu’on applique les préceptes de la bible – qui disent qu’un homme ne doit pas aimer un homme et qu’une femme ne doit pas aimer une femme. Mais au-delà de ça, les choses bougent dans le bon sens. Les textes dont vous parlez date de quatre ou cinq ans. Et les artistes et les associations d’homosexuels (notamment l’organisation britannique OutRage !) ont passé un accord en présence de Scotland Yard (la police londonienne, ndlr) pour qu’il n’y ait plus de textes homophobes chantés. Et je pense que les associations gay ont bien fait de réagir vivement et il faut encourager à faire bouger les choses.
Aviez-vous songé à parler de l’homophobie dans votre film ?
J’ai souhaité traiter l’homosexualité, mais je ne voulais pas le faire de façon superficielle. Or cela prend du temps, il m’aurait fallu 50 ou 60 minutes et je ne pouvais pas me le permettre. Mais encore une fois, les choses bougent et l’homosexualité et les homosexuels sont de plus en plus acceptés. Il y a une espèce de mode de l’homosexualité chez les femmes, qui la vivent comme une émancipation vis-à-vis des hommes. Lady Saw et Tanya Stephens (qui apparaissent dans le film) jouent d’ailleurs un rôle important dans l’émancipation des femmes. Je pense que l’avenir de la Jamaïque passe par les femmes.
Des artistes, dont Lady Saw, parlent de sexe de façon hardcore comme les hommes parce que les textes mielleux n’ont pas la cote…
Cela fait partie de l’émancipation. Je ne suis pas des gens qui considèrent avec mépris ou condescendance ceux qui parlent librement de sexe. Surtout que leurs textes sont une vraie poésie de la rue. Ces artistes mettent les femmes dans une position où elles revendiquent le droit au sexe, au plaisir et donnent leur regard sur les hommes. Certaines de ces chansons sont devenues des hymnes pour les femmes en Jamaïque. Lady Saw a été bannie des radios et des festivals à cause de ce qu’elle chantait mais elle a fini par gagner parce qu’elle était soutenue par les femmes, et aussi par les hommes, parce qu’elle est très bonne dans le dancehall. Aujourd’hui, c’est une porte-parole des femmes qui utilise sa musique comme outil de libération des femmes.
Le film est un véritable clin d’œil au rêve jamaïcain. Comment définiriez-vous ce rêve ?
C’est la volonté de s’en sortir, de quitter le ghetto et de devenir une star. Comme dit Elephant Man, « j’ai prié pour que Dieu fasse de moi une star, et il m’a exaucé ».
Habibou Bangré, afrik.com

mardi 4 septembre 2007

L'homosexualité en Algérie....

Communauté des homosexuels en Algérie

« Nous sommes tous des passagers clandestins »
Si l’homosexualité reste aujourd’hui un tabou important, les homosexuels sont sortis de leur isolement, grâce à Internet, et une communauté discrète émerge dans les grandes villes du pays l Bien que la pratique soit définie comme « acte contre nature » et criminalisée par les articles 333 et 338 du code pénal, les homosexuels, contraints généralement à mener une double vie, tentent d’adapter leur identité à une société qui les marginalise et les tolère tout à la fois.
Nous sommes devenus des experts en mensonges, des schizophrènes à l’image de la société algérienne tout entière. » C’est sur cette phrase, ou presque, que Karim débute le récit de sa vie, ému et volubile dans le décor pastel d’un salon de thé. Trentenaire, aide-soignant à Constantine, marié depuis 4 ans et père d’une petite fille, il a pu nommer, à l’âge de 12 ans, au hasard d’un livre médical sur La psychologie de l’anormal, ce désir naissant et cette étrange sensation d’être unique qui le taraudait depuis longtemps : l’homosexualité. Dès lors, un long et chaotique parcours de culpabilité commence : de fugues en visites chez des psys, de confidences évasives à une mère qui le met sous surveillance à une pratique soudaine et excessive des commandements religieux, d’espoirs en dépressions, Karim tente, plusieurs fois, de mettre fin à sa vie, une vie où il a pourtant connu neuf années d’un amour intense avec un homme qui a fini par épouser… sa sœur. Pressé par ses parents, il se résigne à se marier avec une femme dont il ne partage plus la chambre. « Ce mariage, je l’ai vécu comme un viol. Ma femme, je ne peux pas la rendre heureuse. Je ne peux pas. » Pour exister derrière le masque et trouver une issue identitaire à la négation sociale, il écrit, crée des réseaux, milite clandestinement, notamment à travers la création d’un blog et l’ouverture d’un cybercafé qui serait, comme beaucoup d’autres et en toute discrétion, « un refuge, un repos ». « Internet a été un vrai soulagement pour nous, explique-t-il. ça nous a sortis d’un isolement mortel. » Il a d’ailleurs trouvé son homme du moment, sur un site de rencontres très prisé. Quelques heures plus tard, adossé à la banquette moelleuse d’un bar de nuit enfumé, Redwane, jeune écrivain truculent et raffiné, s’égosille malicieusement sur : « Je suis un homo, comme ils disent », la célèbre chanson de Charles Aznavour. L’univers amical et festif, ce soir, essentiellement hétérosexuel et féminin, où il évolue en toute liberté, c’est la part officieuse de sa vie : « Si mes parents savaient, ils me tueraient carrément. » Exemples de doubles vies déclinables à l’envi. Ce phénomène souterrain mais réel et inscrit dans le champ des pratiques sociales invisibles s’estompe au fur et à mesure que l’on monte dans les sphères de la société. Kamel, la trentaine, élégant, travaille dans une importante société étrangère. Il connaît Paris et son quartier célèbre du Marais, mais l’évoque dans une moue indolente : « Alger est infiniment plus drôle. » Son plaisir à lui, c’est la finition haute couture, l’originalité et l’allure. « Il faut oser. Ces vêtements, c’est comme une armure. Je peux arriver au boulot avec un costume rose, personne n’osera me poser de questions. ». « Et la famille ? » « Les choses sont claires, on ne s’étale pas. » Autant d’éléments qui, de son point de vue, le distinguent des « cas sociaux », comme il les nomme négligemment.

Déni légal, déni social

Si en Algérie comme ailleurs l’homosexualité est plurielle, la réponse est la même pour tous : articles 333 et 338 du code pénal. Lorsque l’outrage public à la pudeur, puni de deux mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 à 2000 DA, consiste « en un acte contre nature avec un individu du même sexe », la peine passe de six mois à trois années de prison et d’une amende de 1000 à 10 000 DA. Et l’article 338 punit tout acte d’homosexualité de 2 mois à 2 ans de prison et de 500 à 2000 DA d’amende. « En criminalisant notre sexualité, on criminalise notre identité toute entière, notre quotidien, notre vie. On nous réduit à un acte sexuel. Du coup, on a du mal à se voir autrement, à s’accepter », souligne Momo, jeune et fragile étudiant en droit à Alger, croisé dans un café. Impossible avec cette loi de créer une association ou d’ouvrir un lieu ouvertement destiné à cette population. En conséquence, par exemple, nombre d’associations de prévention et de lutte contre le VIH n’osent pas s’aventurer, sous peine d’amalgames compromettants, dans une démarche de travail officielle vers la communauté homosexuelle. « J’ai contacté une association féminine pour l’épanouissement de la personne et l’exercice de la citoyenneté. Elles n’ont pas souhaité me répondre », raconte Fatima, jeune étudiante de Tébessa, spontanée, combative et qui aime les femmes. Dans les grandes villes, cependant, divers lieux sont confidentiellement destinés à la population homosexuelle et, de fait, discrétion oblige, la clientèle est mixte, ce qui permet un brassage permanent des identités. Mais, plus grave, cette relégation de l’homosexualité au rang des comportements illégaux se double d’une impossibilité d’accès aux droits les plus évidents : « Il y a quelques années, j’ai subi une tentative de viol par un ancien camarade d’école marié. Comme je me suis défendu, il a paniqué, il a essayé de m’écraser avec sa voiture. Je ne peux pas porter plainte. Tu imagines un flic remplir gentiment son procès-verbal ? Laisse tomber. On a toujours été à la fois la cible des intégristes et les victimes de la police », explique Karim dans un sourire amer. « Cette loi est une épée au-dessus de nos têtes et elle donne raison à tous de nous maltraiter », conclut-il. Pourtant, l’existence des articles 333 et 338 est assez méconnue, même par les premiers concernés. C’est qu’ils sont, dans les faits, peu appliqués. Ils ne font que couronner un climat de peur, de honte ou de malaise qui est, en fait, entretenu par une censure sociale, familiale et religieuse concernant la sexualité en général et les comportements sexuels dits « déviants » en particulier, considérés globalement comme un danger pour l’ordre social et la préservation de la culture musulmane. « Franchement, en soi, l’homosexualité me dégoûte carrément, explique Amin, jeune marié moderne. J’ai pourtant eu un voisin homo d’un certain âge qui était quelqu’un de très bien. Il n’en faisait pas étalage, il rendait tout le temps service, normal. En fait, si on n’accepte pas cette sexualité, c’est qu’on a peur qu’ensuite ça prenne de l’ampleur et qu’il y ait un oubli progressif des valeurs musulmanes qui sont notre force identitaire et culturelle. » Cette peur se traduit par l’existence d’un cadre législatif clair, qui s’appuie sur la charia islamique et n’envisage la sexualité que sous l’angle de la procréation dans le cadre du mariage. « Il n’y a rien de positif dans cet acte contre nature, affirme le conseiller en communication du ministre des Affaires religieuses. Il faut encourager la croissance démographique et donc encourager le mariage entre l’homme et la femme, c’est cela qui est conforme à toutes les lois du monde et aux lois de toutes les religions monothéistes. » Le conseiller du ministre estime ainsi que sur tout le territoire algérien, ils ne sont pas plus de 2000, un chiffre qui, sur une population d’environ 35 millions de personnes, en fait implicitement une minorité négligeable, logiquement marginalisée. De visu, ce chiffre est largement contestable et contesté par de nombreuses associations étrangères qui estiment de façon générale que la population homosexuelle représente au moins 6 à 8% de la population globale de chaque pays du monde. Mais dans ce contexte où l’identité homosexuelle ne peut être ouvertement déclarée, une étude chiffrée fiable n’a jamais pu être effectuée. « Dans un pays où on chasse les amoureux des parcs, quand il y a une visite d’un chef d’Etat, comment veux-tu qu’on tolère ouvertement les ‘’nekoucha’’ ? », s’esclaffe Redwane.

Rejet religieux et maladie morale

« L’Algérie est un pays musulman. La religion accompagne la vie quotidienne. Si tu rajoutes les traditions, le tout mélangé à l’hypocrisie… Ils connaissent notre existence mais ouvrir le débat, c’est inenvisageable pour eux, c’est contre nature, point à la ligne, débrouillez-vous ! », tempête Fatima. Néanmoins, nombreux sont ceux et celles qui souhaitent rester clandestins. « Pour vivre heureux, vivons cachés » est une expression qui revient souvent. « Ils ont peur d’être amalgamés avec les “folles” ou les “transgenres”, qui s’assument d’ailleurs radicalement, et les prostitués, qui le sont souvent devenus après s’être fait jeter de leur famille. Ils pensent que la clandestinité est la seule liberté à laquelle ils peuvent aspirer. Mais la liberté, ce n’est pas ça ! On ne veut pas une gay-pride ou le droit de s’embrasser en pleine rue. Nous sommes aussi des musulmans, même si, du coup, notre orientation peut rendre notre rapport à Dieu très compliqué. On désire juste avoir le droit à la différence et à la dépénalisation de notre identité. ça prendra un temps fou », précise calmement Karim. Cette revendication semble bien outrancière à l’imam Youssef El Qaradhawi, idéologue des Frères musulmans et auteur du livre Le licite et l’Illicite où l’on peut lire que, si les opinions des juristes de l’Islam divergèrent concernant « les punitions de cette abominable pratique », le meurtre des homosexuels « n’est qu’un moyen pour épurer la société islamique de ces êtres nocifs qui ne conduisent qu’à la perte de l’humanité ». Cette lecture fondamentaliste du texte sacré, que tous les musulmans ne partagent certes pas, nous a été confirmée par le mufti Yahia, au ministère des Affaires religieuses (cf. article ci-contre) : « L’homosexualité est une inversion contraire à la nature qu’il faut soigner et, littéralement, dans le texte, punie de mort. Comment, dès lors, ne pas percevoir cette pratique comme une aberration ? » « On en est tous imprégnés, raconte Karim. Pour ma première tentative de suicide, j’ai voulu me jeter du haut d’un ravin avec la voiture de mon père. J’avais 18 ans. Depuis, j’ai appris que l’Islam punit l’homosexuel en le jetant du haut d’une falaise. C’est marrant, non ? » Ce refoulement de l’homosexualité en tant que pratique non conforme à la loi de Dieu aboutit parfois à la théorie d’une homosexualité importée d’Occident, « tare de la race blanche », amalgamée avec la maladie mentale, voire la maladie morale, comme incapacité de résistance à une pulsion ou à la pédophilie. Au mieux, comme on peut le lire sur les nombreux forums de discussion de sites religieux, où le sujet est d’ailleurs régulièrement examiné avec une docte bienveillance, l’homosexualité est une maladie ou une déviation du droit chemin qu’il faut accompagner et guérir, notamment par le « sabar ». « Je ne suis pas malade. Ma sexualité n’est pas un choix ni une malédiction. Je suis comme ça. Point », martèle Momo qui, paradoxalement, dit comprendre la lapidation des homosexuels et souhaite se marier un jour, afin d’être en accord avec sa religion. Pour la majorité d’entre eux, la clandestinité est donc la seule voie : « Je m’assume mais m’afficher, c’est impossible », explique Fatima. « L’homosexualité est essentiellement envisagée sous l’angle masculin. Elle est vécue dans les sociétés arabo-musulmanes comme une dépravation, c’est vrai, mais aussi comme une maladie de la virilité. Alors que chez nous, l’homme doit être un conquérant, un pilier. C’est aussi ça qui dérange. C’est la honte. Du coup, beaucoup d’homos se déguisent en machos avec leurs potes de quartier. C’est de l’hypocrisie : du fait de la séparation hommes/femmes de notre société, nombreux sont les hétéros qui ont eu leur première expérience sexuelle avec un partenaire du même sexe. La frontière est plus ténue qu’ailleurs. L’homosexuel ou la prostitution masculine, en Algérie, c’est aussi la sexualité du pauvre ou de l’hétéro en manque. On se fait souvent draguer par des hétéros mariés, faut pas croire », affirme Abdelkader, discret militant de la cause.
Entre le rêve et l’affirmation de soi
« On rêve de cette vie, quitter le bled pour vivre là où l’identité gay est acceptée et le droit protégé, un vrai paradis gay sur terre ! Mais je suis prête à mener le combat ici même si je sais qu’un jour, ça me tombera sur la tête… », écrit Fatima. La « harba » ou la lutte est un dilemme pour cette jeune femme, qui affirme son homosexualité par petites touches, de ses tenues gothiques customisées au pin’s arc-en-ciel, symbole international des homosexuels, sur le sac de cours. Elle a fait son coming-out (révélation de son homosexualité) à trois de ses amis, qui n’ont pas changé d’attitude envers elle depuis. « Ils m’ont acceptée comme je suis. En Algérie, ceux qui ont une certaine ouverture d’esprit et ceux qui se sont ouverts aux autres cultures nous acceptent mieux. Pour ce pays fermé sur lui-même, c’est rassurant », raconte-t-elle. Effectivement, à Alger, comme dans de nombreuses grandes villes, la visibilité des homosexuels grandit : dans cette capitale où l’anonymat contribue à l’aisance, certaines places bien connues sont devenues des lieux de rencontres diurnes. Il suffira d’un sourire pour créer le lien et entrer rapidement dans le « vif du sujet ». La clandestinité ne permettant pas de longues tergiversations, les propositions sont étonnamment directes. Une communauté embryonnaire émerge donc, à travers Internet, se rencontre dans les cafés ou les salons de thé, fréquente des boîtes de nuit à population mixte connues pour leur « accueil » indifférencié, les restaurants nocturnes à l’atmosphère cossue ou les concerts de certaines icones du raï. La révélation de son homosexualité se fait entre amis, dans le cercle intime, auprès d’une tante moins traditionnaliste ou d’un cousin compréhensif. Si la prudence reste de mise dans son quartier et est souvent vitale au sein du noyau familial, un espace de liberté privée, vital lui aussi, s’ouvre, mêlant homosexuels et hétérosexuels. « Il y a vingt ans, un homo, dans mon quartier, on lui lançait des pierres. Aujourd’hui, on lui parle normal. Je ne sais pas si c’est bien mais c’est comme ça », constate Azzedine, perplexe. « Redwane est comme il est, c’est mon ami, je ne fais pas abstraction de son homosexualité, je n’en fais pas un plat non plus. Ça lui appartient, c’est tout. Quand on aime les gens, on ne fait pas le tri », confie pudiquement Mus’, qui esquive cependant discrètement un geste amical un peu appuyé de son camarade. Mais si l’acceptation et la mixité sociale sont en marche, les difficultés, notamment au sein de la famille, restent énormes. « Mon frère a trouvé une lettre d’amour d’un ex. Il ne m’a plus jamais adressé la parole. Je ne comprenais pas pourquoi, jusqu’à ce qu’il me croise avec un ami pas très loin de mon quartier. En pleine rue, il m’a frappé et m’a menacé de tout révéler à mes parents. C’était intenable, je suis parti. Et j’ai pas mal galéré », raconte pudiquement Momo, les larmes aux yeux. « Je suis algérien, musulman et homo, autant dire un extraterrestre sous antidépresseurs », conclut-il cyniquement. Et pour nombre d’entre eux, leur planète est ailleurs, de l’autre côté des frontières, de l’autre côté de l’exil. Mais s’expatrier n’est pas si simple : « Pour faire une demande d’asile en tant qu’homosexuel en France, il faut apporter des preuves de persécutions personnelles et prouver que l’on court des risques sur l’ensemble du territoire algérien, c’est-à-dire qu’on a déménagé plusieurs fois et qu’on a subi partout des harcèlements », explique Hugues, membre d’une association française qui travaille à la reconnaissance du droit à l’immigration et au séjour des personnes homosexuelles. Les cas qui aboutissent sont rares, mais nombreuses sont les associations européennes qui œuvrent discrètement et parfois illégalement à l’accueil des étrangers homosexuels. « Notre enfermement est multiple, territorial, familial, religieux, intime. Le pire est de réaliser que dans ce pays où je suis né, mon homosexualité est un crime mais l’homophobie, même la plus violente, non. Même les ligues de droits de l’homme se désintéressent de notre cas. J’aimerais partir mais j’ai une fille à élever, elle n’a rien demandé. Et si je dévoile ma sexualité, j’ai peur qu’on l’élève dans la haine de son père. Je ne sais pas quoi faire. Alors, j’essaye de me battre, d’agir, de rassembler. On me dit que je suis fou mais tout ça prend vraiment forme. Ma religion veut des hommes conquérants ? A ma façon, j’en suis un », sourit Karim. Et, l’œil rieur, il cite une phrase de Tahar Ben Jelloun : « La nature crée des différences, la société en fait des inégalités. »
Delphine Gourlay

mardi 28 août 2007

Vivre son homosexualité au Québec



Au Québec : Pas facile d'afficher son homosexualité sans choquer




Encore en 2007, il est difficile d'afficher son homosexualité sans craindre des répercussions. Marc (nom fictif) est un jeune homme dans la vingtaine qui, après qu'il ait décidé de rencontrer La Voix pour tenter d'aider d'autres jeunes qui vivent leur orientation sexuelle dans l'ombre, a choisi de ne pas dévoiler son identité suite à des pressions familiales. "J'assume mon orientation sexuelle, mais ma famille craint pour ma sécurité. En juin, un gars a reçu toute une raclée au centre-ville à cause de son orientation sexuelle.", explique-t-il. Même s'il désirait dévoiler son nom publiquement, sans toutefois être photographié, Marc a décidé de demeurer anonyme pour respecter la volonté de ses proches.
C'est à l'âge de 20 ans qu'il a découvert qu'il éprouvait des sentiments face à un autre gars. Après trois mois, les rumeurs sur son compte allaient bon train et il a décidé de l'avouer à son meilleur ami. "Va chier, je ne te crois pas", lui-a-t-il répondu. Un silence d'une dizaine de secondes suivit. "Il a fallu un mois pour que notre relation d'amitié revienne. Une simple claque sur l'épaule le rendait mal à l'aise au début", dit Marc. Ce fut ensuite le tour des parents qui ont eu beaucoup de difficultés à accepter ce fait. "Ce fut une bataille psychologique de plusieurs mois. Mon père pensait me guérir au début." Quelque temps plus tard, il tenta de s'enlever la vie en bouchant le tuyau d'échappement de sa voiture. "L'intervenante a rappelé trois fois pour me garder éveillé. Une fois à l'hôpital, on m'a dit que si les secours étaient arrivés 15 minutes plus tard, c'était fini", confie Marc.
Marie-Line St-Arnaud, directrice générale de Suicide Alerte, confirme que le rejet et les pressions sociales rendent les homosexuels plus vulnérables aux tentatives de suicide. "Il y a plus de détresse et les homosexuels sont confrontés à de nombreux stéréotypes et préjugés. Nous tenterons de l'aider dans l'immédiat, mais la personne devra aller chercher de l'aide", dit-elle. Si Montréal possède plusieurs organismes pour aider les jeunes homosexuels, ce n'est pas le cas dans des petites villes comme Sorel-Tracy. "Il n'y a pas de groupe d'entraide, ni de ressource pour eux. Ce serait quelque chose à penser que de créer une association pour les gais et lesbiennes ici", conclut Mme St-Arnaud. Briser les stéréotypesMarc est un sportif. Il a boxé dès son jeune âge et il assume pleinement sa virilité. Après avoir fait son coming out, il a progressivement retrouvé un sens à sa vie. Plusieurs homosexuels, surtout des jeunes, se confient à lui. La majorité d'entre eux vivent leur relation en secret et à l'abri des regards.
Même si les gens acceptent mieux qu'avant l'homosexualité, certaines personnes ont encore de la difficulté à comprendre. "Un collègue de travail a déjà évité de me parler pour éviter que les autres croient qu'il était gai", commente Marc. Les chuchotements, les blagues de mauvais goût et la peur font encore partie de la réalité de Marc. Aider les autresSelon Marc, il existe trois types d'homosexuels qui vivent dans notre société. "Il y a celui qui s'accepte et qui se fout de ce que pensent les autres. Celui qui cache la vérité et qui tentera de dissimuler tous les signes au quotidien. Moi, je fais partie du troisième type, celui qui a réussi à vivre comme avant son coming out", dit-il. Marc se sent mieux aujourd'hui et plus accepté de ses proches. Il a décidé de devenir bénévole pour le Groupe de recherche et d'intervention sociale gaies et lesbiennes de Montréal afin d'aider à démystifier l'homosexualité dans les écoles. "Je voudrais être intervenant. Je veux que les gens qui me parlent comprennent qu'ils peuvent accepter ce qu'ils sont et dire aux gens d'arrêter de pointer du doigt, d'entretenir les commérages et de diminuer les homosexuels", conclut Marc.

jeudi 23 août 2007





Rétrospective sur le PACS



La France était si fière de son modèle, et si tranquille. Chacun vivait sa sexualité librement, du moins le croyait-on. Il y avait, d'un côté, les gens mariés, entendons un homme et une femme. De l'autre, des couples en union libre, hétérosexuels ou homosexuels. Les premiers finissaient parfois par se marier, pour payer moins d'impôts par exemple. Les seconds ne pouvaient célébrer d'union. Ils avaient la réputation d'être les plus libres, les plus jouisseurs. On respectait leur choix d'aimer quelqu'un du même sexe, l'homosexualité était même sortie du code pénal en 1982.

Un jour, c'était en l'an 1998, une formidable éruption ébranla l'Hexagone. L'apparition d'un mot nouveau dans les conversations déclencha des querelles dans toutes les chapelles : le pacs, pacte civil de solidarité. Un contrat qui consacrait la reconnaissance des couples "quel que soit leur sexe" allait être débattu au Parlement. Les socialistes venaient d'arriver au pouvoir.
Quelques parlementaires avaient arraché cette promesse à leur chef de file, Lionel Jospin, après des années de militantisme et quelques projets restés dans un tiroir, tel le contrat d'union sociale (CUS). Le pacs répondait aussi à une urgence. Depuis les années 1980, le développement du sida avait brisé nombre de couples, surtout homosexuels. Après des années de vie commune, le compagnon survivant pouvait être délogé de l'appartement par les parents du défunt. Surtout lorsque ceux-ci avaient mal digéré l'homosexualité de leur enfant. En mettant fin à ces pratiques, le pacs brisait le tabou de l'homophobie ambiante.


Pas fou, le premier ministre avait fixé les règles du jeu. Le pacs ne doit pas être assimilé au mariage. Pas de passage devant le maire, pas d'adoption. On ne touche pas à la famille, compris ? On vote le texte, et on referme la fenêtre parlementaire. Pas dupes, répliquèrent nombre d'intellectuels et d'experts. Le pacs va forcément ouvrir la porte, à terme, au mariage gay et à l'homoparentalité. La droite applaudit, qui vota contre le texte, à l'exception notable de la députée (RPR) Roselyne Bachelot. Ringards, homophobes !, tonnait la gauche "moderne".


Le débat s'est donc ouvert sur un malentendu. On s'écharpa autant sur les hypothétiques conséquences du pacs que sur le projet lui-même. La France était mal préparée à cette discussion. Fidèle à sa tradition universaliste, elle n'avait guère coutume de légiférer sur les minorités, sous peine, craignait-elle, d'embrasser le communautarisme américain.


Des psychanalystes n'eurent pas de peine à faire entendre leur voix : celle de la différence des sexes, principe anthropologique qui fonde l'institution du couple et de la filiation. "Il n'est pas discriminatoire de dire que la relation homosexuelle, qui n'est pas un couple, ne peut pas représenter cette triple symbolique qui débouche, elle, sur la relation père, mère et enfant", défendit le prêtre et psychanalyste Tony Anatrella.


Quelques rares voix de psys dénoncèrent cet "ordre symbolique, estuaire théorique où confluent Lévi-Strauss, Lacan et le droit positif de la famille", décrypta Michel Tort. "Il est impossible de proposer du couple, de la famille ou de la filiation quelque définition anhistorique : dans le temps et dans l'espace, les sociétés remodèlent les institutions qui les définissent", approuvèrent, en écho, les juristes Daniel Borrillo et Marcela Iacub, ainsi que le sociologue Eric Fassin. Au-delà du pacs, les trois auteurs plaidèrent pour l'égalité des droits entre tous les couples, afin de ne pas "s'arrêter à mi-chemin".


Une autre gauche défendait une logique opposée. "Faut-il faire comme s'il allait de soi qu'un choix de vie sexuelle doive faire l'objet d'une reconnaissance institutionnelle ?", s'interrogèrent, dans une tribune, l'anthropologue Françoise Héritier, l'historien Paul Veyne, le philosophe Heinz Wismann, etc. Plutôt que le pacs, pourquoi ne pas étendre le concubinage aux homosexuels ?, proposa le sénateur socialiste et ancien garde des sceaux, Robert Badinter, approuvé par une partie de la droite. Le gouvernement lui donna satisfaction pour colmater la brèche. Tout en maintenant le pacs, évidemment.


Des philosophes relayés par la droite conservatrice déplorèrent l'esprit du contrat, révocable sans préavis. "Dans le cadre du mariage, les avantages financiers et fiscaux ne visent pas à conforter les comportements d'une morale traditionnelle, mais à rendre matériellement réalisable l'engagement sur le long terme (...). Vouloir étendre ces avantages aux couples pacsés, donc libérés d'engagement sur le long terme, revient à signifier que l'engagement vis-à-vis des enfants et du conjoint n'a pas plus de sens que le non-engagement", expliquait Chantal Delsol, professeur de philosophie. "Peut-on enfin reconnaître que le pacs ouvre une solution de plus et non une solution contre le mariage ?", répondait la députée socialiste Catherine Tasca, alors présidente de la commission des lois de l'Assemblée nationale. On taira avec indulgence les noms des avocats qui affirmèrent, dans ces colonnes, que compte tenu de certaines modalités juridiques (l'indivision, par exemple), "la loi est inapplicable et restera lettre morte".


Depuis son entrée en vigueur, le 15 novembre 1999, plus de 260 000 pacs ont été signés (chiffres de janvier 2007). La droite a remisé ses positions hostiles. La controverse semble presque rétro. Et le pacs bien timide au regard des réformes engagées chez certains de nos voisins européens (mariage homosexuel au Danemark, en Espagne, etc.).


Mais le pacs reste actuel au sens où les débats qu'il a ouverts n'ont plus quitté le paysage politique. Aujourd'hui, l'UMP fait grincer les dents avec son projet de "contrat d'union civile" qui conférerait les mêmes droits que le mariage aux homosexuels, sauf la filiation. Huit ans après l'éruption, le volcan fume encore.

mardi 7 août 2007

Une enquête sur l'homosexualité




Les ambassades néerlandaises ont reçu la consigne d'enquêter sur la situation et les droits éventuels des homosexuels dans les 36 pays avec lesquels les Pays-Bas entretiennent des rapports de coopération.
A l'issue de cette enquête, ils pourraient décider soit de faire pression sur les gouvernements les plus répressifs, soit d'aider les groupes de défense des homosexuels, voire d'adapter les montants de leur aide financière.
Même si cette dernière mesure a les faveurs de certaines organisations non gouvernementales et de défenseurs de la cause homosexuelle, elle ne semble pas privilégiée, a priori, par le ministère de la coopération, qui ne l'exclut cependant pas complètement. Dix-neuf des 36 Etats qui bénéficient de l'aide des Pays-Bas, dont le Nigeria et l'Indonésie, répriment l'homosexualité en la punissant, selon les cas, d'amendes, de la détention à perpétuité ou de la peine de mort. La puissante Association néerlandaise pour l'intégration de l'homosexualité (COC) - le plus ancien mouvement gay au monde, créé en 1946 - a convaincu le nouveau ministre de la coopération, le travailliste Bert Koenders, de dresser un inventaire mondial du droit des homosexuels.
M. Koenders a, en parallèle, invité ses ambassadeurs à faire pression sur les régimes les plus répressifs, mais a précisé qu'il ne s'agissait pas d'exporter le modèle néerlandais, qui autorise notamment le mariage entre personnes du même sexe. Une disposition qui, il faut le noter, a fait récemment l'objet de modifications, les fonctionnaires municipaux pouvant invoquer leur refus de célébrer de telles unions.
La question du droit des homosexuels dans le monde est vive aux Pays-Bas depuis qu'en 2006, le gouvernement chrétien libéral de l'époque a longuement hésité à accorder le droit d'asile à des homosexuels iraniens. Alors que la ministre de l'immigration, Rita Verdonk, affirmait qu'ils ne courraient aucun risque s'ils étaient expulsés vers leur pays d'origine, l'opposition et diverses associations rappelaient l'exécution de deux homosexuels iraniens en 2005. Les demandeurs d'asile ont finalement reçu un titre de séjour.
Les autorités néerlandaises manifestent leur intérêt pour les conclusions auxquelles sont arrivés, en 2006, des experts internationaux qui ont mis au point les principes dits de Jogjakarta, du nom de la ville indonésienne où ils ont été signés. Le groupe, qui a établi que 91 Etats répriment toujours l'homosexualité, a fixé des normes juridiques et des recommandations afin d'assurer une égalité entre toutes les personnes, quelle que soit leur orientation sexuelle. Ce texte a été présenté, en mars, au Comité des droits de l'homme des Nations unies. Comité devant lequel, en 2005, 54 Etats avaient demandé une action contre les violations flagrantes des droits des personnes homosexuelles, lesbiennes, bisexuelles ou transsexuelles.
Jean-Pierre Stroobants

samedi 4 août 2007

Un film africain sur l'immigration....




















Entretien : Joséphine Ndagnou “ Mon film est l’expression d’un sentiment d’indignation et de révolte ”
Premier rôle dans le film, scénariste, dialoguiste et réalisatrice, Joséphine Ndagnou parle de “ Paris à tout prix ”, des moyens financiers et matériels et des conditions de tournage. La prostitution, les voies anormales pour obtenir un visa, l’homosexualité…
Quelle est la place qu’occupe le vice dans votre film ?
Une place très importante. Quand on parle d’une jeunesse en perdition, c’est celle qui est confrontée à toutes les tentations d’une société en plein tumulte. A partir du moment où les gens n’ont plus d’autres sources de revenu, le commerce du sexe prend une part très importante dans la société. Cette jeunesse en détresse interpelle le cinéaste que je suis. Le vice dans le film permet de montrer l’ampleur de la tourmente et surtout à quel point les jeunes sont amenés à aller jusqu’au bout du sacrifice suprême pour assouvir leur rêve. L’homosexualité défraie la chronique depuis quelque temps dans notre société. Comment aurais-je pu l’éluder ? Les jeunes s’abandonnent dans l’homosexualité à cause de la misère et du chômage. En tant que cinéaste, je me suis trouvée profondément affligée, devant cette jeunesse africaine, victime de la misère et de la pauvreté. En la voyant sombrer dans la déshumanisation et la fatalité, j’ai compris qu’il fallait faire quelque chose. “ Paris à tout prix ” est avant tout, ma riposte à la dérive collective d’une jeunesse en manque de repères. Une jeunesse qui n’a d’autres rêves que la fuite, l’exil et l’émigration. Mon film est l’expression d’un sentiment d’indignation et de révolte.
Vous avez choisi de montrer l’aspect catastrophe de l’émigration. Certaines langues pensent que vous vous êtes profondément inspiré du discours de Nicolas Sarkozy.
Il y a des Africains qui réussissent à se tirer d’affaire en Occident certes. Mais ils sont combien ? Quoi qu’on dise, l’Africain n’est pas le bienvenu en Occident. Quand on a vécu en France (j’en sais quelque chose), on mesure l’ampleur du mépris et de la condescendance. Très peu de personnes, en dépit de leurs qualifications, y sont utilisées selon leurs compétences réelles. Mais très souvent on entend les Africains dire qu’il vaut mieux être balayeur là-bas plutôt que de rester dans son pays. On oublie une chose ; l’Occident est saturée. Tout le monde n’a plus accès au balai. Ne balaye plus les rues de l’Occident qui veut. Je ne dis pas stop à l’émigration. Je pense qu’il faut y aller, avec conviction, en sachant ce qu’on va y chercher. Il faut opter pour le départ utile. Je suis allée, je suis revenue pour travailler, être utile à ma manière pour mon pays. J’aimerai que tous ceux qui partent gardent en tête, le retour au pays natal. Qu’ils pensent que les bénéfices de leur émigration doivent profiter à leur pays. L’Afrique a besoin d’être bâtie. Si nous faisons partir tous les bras valides, si nous assistons impuissamment à l’extraversion des valeurs et compétences de l’Afrique, qui va bâtir ce continent ? C’est un questionnement qui interpelle tous les hommes de pouvoirs et les dirigeants africains. Il peut y avoir une ressemblance entre ma démarche et le discours du président français. Mais je ne suis pas pro-Sarkozy. La manière par laquelle, il tolère que les Africains soient rapatriés, me révolte. Son discours sur l’aide à concéder aux gouvernements africains, pour permettre la création des emplois, en vue de limiter le flux des candidats au départ, manque encore de visibilité. Tant qu’il n’y aura pas de chronogramme et de vigilance sur l’utilisation de cet argent. Je suis d’accord avec le président Nicolas Sarkozy pour l’aide qu’il faut apporter à l’Afrique. Comment rester insensible, en regardant, les jeunes Africains être traités comme du bétail humain ?
Parlons-nous des conditions techniques du film. A sa création, le projet de ce film était très modeste. J’avais juste mon scénario en mains.
Sans le moindre sou, ne sachant pas par quel bout commencer. Et pourtant, j’étais motivée et prête à prendre les risques qu’il fallait, pour présenter à l’écran, les affres et les dessous scandaleux d’un rêve, qui dans la plupart des cas, s’achève par un cauchemar. Au regard des souffrances, les misères de la jeunesse africaine et de l’amère désillusion, qui couronne souvent la mésaventure. Pour pallier l’absence des moyens financiers et matériels, j’ai tendu la main, à des collègues techniciens, dont le talent et l’expérience en matière de l’audiovisuel sont avérés. Si après 17 années d’expérience professionnelle, je n’ai pas pu réaliser de film alors que j’en étais bien capable, je me suis dit qu’il y avait des jeunes comme moi, armés de courage et de bonne volonté, capables de braver le challenge. Sur le plan technique, je me suis essentiellement appuyée sur une équipe camerounaise pour tourner le film. Claude Pountu a accepté d’assurer les prises de vue et d’être en même temps, le chef opérateur. Joseph Awoulbé a assuré les cadrages et l’éclairage. Ces deux frères et amis m’ont motivée à aller jusqu’au bout du projet, à parfaire le scénario et à le mettre en pellicules. Même Sosthène Fokam Kamga, l’ingénieur de son, a abattu un énorme travail. Pour assurer le montage et la post-production en France, j’ai pris attache avec des expertises qui ont l’habitude du montage des longs-métrages et des chefs d’œuvres cinématographiques.

lundi 30 juillet 2007

Excellent article sur la Tolérance au Canada




Être gai ou lesbienne en milieu collégial et à l'université : zones d'ombre et de lumière

par Jean-François Roberge



Ils sont jeunes, gais, lesbiennes et bisexuels affirmés, et n’ont qu’un but en tête : construire un futur à la hauteur de leurs aspirations. Des jeunes qui croient dur comme fer que leur différence est un atout dans la lutte qu’ils mènent contre les préjugés. Entre deux examens et autant de réunions, ils prennent le temps de se raconter et livrent leurs opinions sur le quotidien des gais et des lesbiennes qui, comme eux, sont toujours sur les bancs d’école. Autant d’expériences uniques, mais ô combien complémentaires, qui tracent un portrait éclairant de leur condition actuelle.

Amélie Gagnon, 28 ans, est présidente de L’Alternative, le regroupement des étudiants d'orientation homosexuelle, bisexuelle et de leurs ami(e)s de l'Université de Montréal. En plus d’être active au sein de son association étudiante, celle du département de démographie, elle contribue au Regroupement des étudiant(e)s démocrates et à l’Action humanitaire et communautaire de son établissement. Citoyenne engagée, elle se considère comme une personne épanouie : « Mon identité a plusieurs facettes : tantôt étudiante, tantôt travailleuse, parfois homo, parfois hétéro. C’est fluide! » Elle pourfend les étiquettes et soutient qu’à la base, ce sont les relations qui sont homosexuelles et non pas les personnes. L’idée est de ne pas catégoriser une personne qu’en fonction de son homosexualité. « Si quelqu’un veut s’identifier en fonction de cela, soit, c’est sa revendication », précise-t-elle. Au courant de ses convictions, c’est un ami qui l’a poussée à assister à sa première réunion de L’Alternative.

Celle qui semble avoir été prédestinée à cette vie revendicatrice, renchérit : « Je suis quelqu’un qui refuse que les uns soient traités différemment des autres en fonction de leur orientation sexuelle. » Interrogée sur ce que vivent les gais et les lesbiennes de son université, elle tente une réponse : « C’est difficile pour moi de commenter cette situation : L’Alternative n’existe que depuis deux ans. Je peux néanmoins dire que ces personnes cherchent à se rassembler, à se connaître, à créer des réseaux de soutien, mais aussi à informer la communauté universitaire de leurs réalités et de la diversité sexuelle. »

«Le pire fléau de notre époque est l’ignorance!»

Elle constate que l’homophobie préoccupe les étudiants qu’elle représente, prenant soin de préciser qu’elle varie en fonction des programmes d’études. Selon Amélie, la lutte contre celle-ci passe par l’information, l’éducation et la communication : « Le pire fléau de notre époque est l’ignorance! L’ignorance crée l’isolement, qui à son tour crée la méfiance, la peur. Avec tant de mauvaises informations sur l’homosexualité diffusées depuis des centaines d’années, ce n’est pas une surprise que l’homophobie existe encore! » Concrètement, elle conseille aux étudiants qui doivent composer avec l’incompréhension de leurs pairs de chercher les réponses à leurs questions auprès de bonnes ressources : organismes, professeurs, intervenants et scientifiques. Il sera alors plus facile de répondre à celles qui leur seront posées. « Souvent, les homophobes ne réalisent pas à quel point une relation homo ressemble à une relation hétéro. Que les questions qu’on se pose, que les choses que l’on vit sont les mêmes », relativise-t-elle pour conclure.

Agir pour changer les choses

Tiago Graça, 22 ans, étudie l’informatique de gestion au Cégep Ahuntsic (Cégep : acronyme de Collège d’enseignement général et professionnel). Responsable de l’association gaie et lesbienne de son Cégep, Le Placard, depuis le printemps 2006, il s’étonne lui-même du chemin qu’il a parcouru en si peu de temps. Tiago s’explique : « Je suis d’origine portugaise. On nous apprend très jeune qu’il y a plusieurs aspects négatifs dans l’homosexualité. Puis, il y a des raisons de religion. C’est très mal perçu. » Il y a deux ans à peine, cet apprenti informaticien avait une peur bleue d’être identifié comme gai. Après en avoir parlé avec quelques ami(e)s près de lui, il livre ses craintes à une travailleuse sociale qui le réfère au Projet-10 qui promeut le bien-être personnel, social, sexuel et mental des jeunes de 14 à 25 ans se questionnant sur leur orientation sexuelle. Il participe à des groupes de discussion régulièrement. C’est la révélation! Il prend conscience qu’il n’est pas seul à vivre cette situation difficile, gagne en confiance et décide de faire le grand saut : « J’avais besoin d’être authentique auprès de mes parents, peu importe la réaction qu’ils auraient », confie-t-il.

Sa sortie du placard n’est pas sans causer des remous au sein de sa famille. Après un déménagement ardu, mais salutaire, Tiago amorce une étape cruciale dans son processus d’affirmation : « Mon déménagement était nécessaire, conclut-il. Signe de mon autonomie et de mon indépendance, il a modifié la perception de mes parents à mon égard qui, même s’ils me voient toujours comme leur petit enfant, me respectent. » Ainsi dynamisé, Tiago commence à s’engager activement dans sa communauté. Il assiste aux réunions de la Coalition jeunesse montréalaise de lutte contre l’homophobie où son énergie est remarquée.

On lui propose d’agir en tant qu’émissaire à la Coalition MultiMundo qui regroupe des organismes communautaires et des individus qui travaillent avec une clientèle LGBT (lesbiennes, gais, bisexuels et transgenres) provenant des diverses communautés ethnoculturelles de Montréal. Elle est fondée officiellement le 8 mai 2006. Quelques semaines avant cela, il est approché par AlterHéros, et accepte la présidence de cet organisme qui gère un site Internet afin de contrer, par l’éducation et la communication, l’homophobie. Entre-temps, il s’implique également au sein du Regroupement d’entraide pour la jeunesse allosexuelle du Québec (REJAQ) dont la mission est de favoriser, auprès de la société québécoise, la compréhension et l’acceptation de la diversité sexuelle des jeunes de 14 à 30 ans. Ces temps-ci, il travaille à recruter des membres pour l’association LGBT du Cégep Ahuntsic : « Nous avons de la difficulté à recruter des gens parce que, comme moi auparavant, ils craignent d’être pointés du doigt. »

«Les premiers contacts au Cégep avec les gars hétéros ont été moins évidents»

Il y a quelques années, Sébastien Huard, 20 ans, s’est investi dans l’Association gaie et lesbienne du Cégep du Vieux-Montréal (AGLCVM), avant de migrer au Cégep de Maisonneuve pour étudier en multimédia. C’est durant cette période qu’il annonce à ses parents son homosexualité. Le fait d’être gai ne lui a jamais réellement posé de problèmes, acceptant même les résistances exprimées par ses parents. « J’ai respecté leur façon de penser », affirme-t-il, avant de préciser que la relation s’est améliorée depuis ce temps. Durant ces années militantes, il apprend beaucoup de ses collègues : « J’ai compris que la meilleure attitude à avoir, c’est d’accepter les gens tels qu’ils sont. De ne pas poser de jugement sur eux. » Pas si simple, lorsqu’on se fait servir la médecine inverse : « Les premiers contacts avec les gars ont été moins évidents. Je savais que je ne devais pas trop leur parler. »

Au local de l’association, il trouve du réconfort, mais surtout des gens avec qui discuter. Sans forcer les choses, les contacts avec les autres étudiants évoluent. « Au départ, j’étais ami avec les filles. Comme elles ont une influence sur les gars… Après trois ans, il n’y avait plus de problèmes! », lance-t-il avec une pointe d’humour. Sébastien se rappelle que la distance entre lui et les autres gars s’est estompée au fur et à mesure qu’ils se sont côtoyés. L’homophobie initiale a fait place à la curiosité : « Je me rappelle avoir passé des midis à répondre à leurs questions. Avec le temps, sans m’imposer et en restant moi-même, ils m’ont accepté. »

Evangeline Caldwell enseigne depuis plus de 20 ans au département de psychologie du Collège Vanier. Militante féministe de la première heure et ardente défenseur du droit au mariage entre conjoints de même sexe dans les médias, entre autres, elle abonde dans le même sens qu’Amélie : « La question de l’amour, du respect de l’amour, est un message qui porte de nos jours. » Selon elle, le vent tourne au Québec. « Depuis les huit dernières années environ, je sens que les droits humains sont au centre des préoccupations des Québécois qui jugent la discrimination dépassée », constate-t-elle. Elle attend beaucoup des conclusions d’un rapport sur la situation des gais et des lesbiennes à l’école qui sera émis par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Pour la première fois, un portrait général de la situation sera connu, endossé par notre gouvernement, et des recommandations seront émises afin d’y remédier.

Entre-temps, Evangeline Caldwell met toutes ses forces au service des étudiants de son école qui ne possède pas encore d’association étudiante LGBT. Elle s’occupe depuis un an d’un « espace positif » – de l’anglais positive space – nommé Open Door Network qui propose des événements sur les questions d’orientation et d’identité du genre aux élèves et au personnel enseignant et qui forme le personnel du collège (cadres inclus) sur ces thématiques-là. Evangeline Caldwell se réjouit du support de la direction du Collège Vanier qui a même débloqué un budget pour cette initiative. Le volet formation remporte d’ailleurs un franc succès : environ dix-huit personnes le suivent par session. Ainsi formées, elles restent à la disposition des élèves qui ont besoin d’écoute et de support. Un logo, clairement identifiable, indique à ces étudiants l’ouverture d’esprit et la volonté d’aider de la personne qui l’affiche. Par cet « espace positif », Evangeline Caldwell tente de démystifier l’homosexualité et ainsi, peut-être, dissiper la crainte chez les étudiants de participer à une future association LGBT.

Patricia Caissy, 26 ans, étudie en ressources humaines à l’Université du Québec à Montréal. Elle raconte comment elle a connu le REDS, le Regroupement étudiant pour la diversité sexuelle, après avoir affirmé sa bisexualité : « Je n’avais pas de modèles, pas d’amis gais, pas de ressources! Alors j’ai été voir l’association gaie de mon université pour connaître des gens qui ressentaient la même chose que moi. » Celle qui est aujourd’hui la vice-présidente aux activités du REDS a bien retenu la leçon : « Moi, je suis bien dans ma peau et à cause de ça, les gens qui me rencontrent peuvent me poser les questions qu’ils veulent et je vais leur répondre du mieux que je peux. Si ces gens préfèrent alimenter leur crainte ou leur haine envers moi sans me connaître, tant pis pour eux! » Appelée à commenter le quotidien des gais et des lesbiennes à l’Université du Québec à Montréal (UQÀM), qui n’affiche pas toujours le même aplomb, elle nuance : les homosexuels doivent s’afficher différemment selon leur domaine d’études. L’étudiant gai en théâtre ou en mode pourra s’afficher tandis que l’étudiant en économie ou en génie va peut-être garder sa vie privée pour lui. » Pour contrer ces inégalités, Amélie croit beaucoup aux vertus de l’engagement social. Et pour ceux qui douteraient du dynamisme de la jeunesse, elle lance : « Les jeunes travaillent sur le terrain, à s’afficher, à s’entraider, à faire du bénévolat, mais surtout à trouver des nouvelles façons de s’intégrer dans la société. »

«On demande aux homosexuels de se sortir du ghetto du Village gai »

Elle semble avoir trouvé dans le REDS un moyen de favoriser la diversité des points de vue, d’encourager la compréhension mutuelle, l’harmonie entre les individus et l’effacement des préjugés. « Le REDS n’est pas un groupe exclusif à la communauté LGBT. Nous représentons la diversité sexuelle, donc nous avons comme membres des gais, lesbiennes, hétéros, bis, etc. Ainsi, on demande aux homosexuels d’être ouverts d’esprit et de se sortir un peu du ghetto du Village gai et aux hétérosexuels de comprendre la dynamique d’entraide de la communauté LGBT et de constater les similitudes entre leur réalité et celle des homosexuels », explique-t-elle. D’autre part, elle déplore le fait que l’homosexualité soit quasiment évincée dans les cours de son université : « Une chose est sûre, c’est qu’il n’y a qu’un cours qui traite d’homosexualité à l’UQÀM et il est optionnel, même pour les étudiants de sexologie... »

«La diversité sexuelle doit être présente dans tous les cours » - Michel Dorais, professeur

Michel Dorais, professeur et chercheur à la faculté des sciences sociales de l’Université Laval à Québec, s’inquiète aussi du fait qu’il n’existe à peu près pas de cours sur l’homosexualité dans le parcours collégial et universitaire d’un étudiant au Québec. « Par exemple, au niveau de la maîtrise, il n’existe qu’un cours qui traite de la diversité sexuelle à l’Université Laval. Il n’y en a qu’un! Et oui, c’est moi qui le donne… Et il ne se donne qu’aux deux ans parce qu’on pense que peu de personnes y seraient intéressées. Quand on pense qu’il y aurait autant de personnes LGBT que d’anglophones au Québec… On donne des cours complets sur les mouvements des femmes et des autochtones. Je suis très content de cela, mais pourquoi n’en est-il pas de même pour les gais et les lesbiennes? » questionne l’auteur de Éloge de la diversité sexuelle (1999).

D’après lui, ce silence s’explique par le caractère encore marginal de l’homosexualité, un sujet qui ne serait pas « digne » d’être abordé en classe. Il félicite l’initiative de certains professeurs qui introduisent dans leur cours cette thématique, mais d’après lui, cela n’est pas suffisant. « Si je parle du développement humain et que je ne mentionne pas qu’une personne puisse se développer avec quelqu’un du même sexe, je ne m’en sors pas. L’aspect de la diversité sexuelle doit être présent. Il faut qu’on en parle partout, dans tous les cours qui parlent de l’être humain », renchérit-il.

Consulté sur la place des associations étudiantes LGBT dans les Cégeps et les universités, Michel Dorais n’est pas complaisant : « Les groupes de jeunes gais et lesbiennes sont importants, mais ce n’est pas suffisant. Les jeunes des associations doivent faire du démarchage. Ils doivent exiger que leur réalité soit abordée dans les milieux d’éducation. » D’après lui, le rôle des professeurs est aussi important. « Ça en prend deux ou trois ouverts d’esprit pour que l’ambiance générale change », convient-il. Pour lui aussi, l’ignorance est source d’homophobie. Ayant déjà reçu des menaces de mort parce qu’il avait écrit en faveur du mariage gai, Michel Dorais persiste et signe : « Il faut prendre la parole socialement. Se défendre soi-même. Je souhaite que les jeunes exigent quelque chose pour eux-mêmes : exiger d’être reconnus, exiger que lorsqu’on parle de la nature humaine, on doive parler d’eux. C’est normal, sinon c’est de l’homophobie passive. »

Des lendemains meilleurs?

La vie des étudiants gais et lesbiennes au collégial et à l’université est loin d’être toujours facile. Heureusement, ces derniers peuvent de plus en plus compter sur des associations qui leur sont destinées pour briser leur isolement et faciliter leur propre acceptation. Il est encourageant de savoir qu’à l’initiative d’étudiants et de professeurs dévoués, les préjugés à leur égard tendent à s’estomper à condition qu’un travail de sensibilisation, de communication et d’éducation soit effectué afin de contrer l’ignorance. À en croire les parcours brillants des étudiants rencontrés, il est possible d’entrevoir pour la jeunesse LGBT autant de réussites édifiantes dans un contexte moins ardu.